Musée des beaux-arts du Canada / National Gallery of Canada

Bulletin Annuel 6, 1982-1983

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Portraits de Joseph Brant par William Berczy

par Gloria Lesser


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John Andre est d'avis que Berczy avait prévu de graver cette oeuvre sur cuivre pour l'inclure dans une série portant sur les paysages et les costumes du Canada, dans le style de Freudeberger, ou pour illustrer les récits des voyages d'Augustus Kendall au Canada. (24) De son côté, Martha Cooke (25) émet l'hypothèse que Berczy s'est inspiré, pour son portrait en pied de Brant, du mezzo-tinto de John Simon (exécuté d'après la peinture à l'huile de John Verelst) représentant le grand-père de Joseph Brant, Sa Ga Yeath Qua Pieth Tow (fig. 6), l'un des « quatre rois indiens » qui étaient allés en Angleterre en 1710. Selon Hugh Honour, (26) plus de deux cents copies des mezzo-tinto de John Simon, d'après Verelst, furent distribuées aux Indiens d'Amérique du Nord et de nombreux artistes des colonies s'en inspirèrent. Cette représentation conventionnelle des marchandises de troc et des vêtements rappelle les Quatre rois indiens. Les gravures tirées à partir des peintures à l'huile des Quatre rois indiens de John Verelst ont influencé certains artistes vivant en Amérique du Nord, dont peut-être Berczy. (27) Mais, c'est peu probable; la pose et le cadre sont différents. La peinture de Verelst fait songer à une gravure de mode alors que celle de Berczy est une oeuvre plus symbolique et plus « officielle ».

Au premier plan, les souches sur lesquelles on remarque des rejets et des champignons évoquent la colonisation, le déclin et le changement. Ces souches sont tout ce qu'il reste des forêts sauvages qu'ont défrichées les premiers colons en Amérique. Une telle scène constitue peut-être un symbole, celui du défrichement pour se frayer de nouveaux chemins et s'installer. Ici, elle peut évoquer la réinstallation des Indiens chassés par la colonisation. Le mezzo-tinto accentue les contours des objets, comme dans les oeuvres à la manière noire de Verelst dont Berczy a pu s'inspirer et où le feuillage a une grande netteté. En conséquence, la flore dans le portrait de Brant, a aussi des contours bien définis.

Voyez-vous, le vieux tronc d'arbre en décomposition symbolise la vie éphémère de toute créature; pourtant, on y voit à présent pousser des plantes, des fleurs et des champignons. Berczy fait du tronc un élément très important avec un extrême souci du détail, à la manière de Dürer. (28)
Berczy était influencé par le nouveau style néoclassique même s'il avait choisi le sujet très romantique du « bon sauvage ». Berczy a réussi à donner au chef indien un aspect imposant en nivelant le fond et le premier plan, ce qui fait se détacher le modèle comme sur un fond de frise. Le deuxième plan et le fond présentent des éléments topographiques visant à situer exactement la scène par rapport au personnage de l'avant-plan.

Le Portrait de Joseph Brant, tableau commémoratif, a surtout valeur de témoignage car il révèle le degré d'acculturation des Indiens. Le tableau est une allégorie des thèmes et des concepts chers à l'Indien et de son attachement symbolique à la terre et aux droits fonciers. La combinaison des vêtements traditionnels avec ceux empruntés aux Blancs et la présence des marchandises de troc, éléments qui constituent les motifs décoratifs de la peinture, donnent une idée de l'ampleur des échanges commerciaux et du degré d'assimilation des autochtones. Le portrait de Berczy est aussi la représentation symbolique du déclin de la civilisation indienne et de l'intérêt qu'on lui portait.

Les portraits humanistes

Le Portrait de Joseph Brant de la Galerie nationale du Canada semble être l'aboutissement d'une suite de compositions de sources variées qui englobe un croquis sur un tronc d'arbre (collection de John Andre) et des études de Joseph Brant, réalisées entre 1794-1797 environ, oeuvres qui se trouvent aujourd'hui dans divers musées et, pour l'une d'entre elles, dans une collection particulière. En 1780, Berczy avait atteint la maturité dans l'art du peintre et avait exécuté, en Europe, des reuvres raffinées. Une fois dans le Nouveau Monde, Berczy ne disposait ni des couleurs, ni du matériel, ni du temps pour exécuter les oeuvres fouillées dont il s'enorgueillissait. Parce qu'il peignait méticuleusement et aimait réaliser des compositions achevées, l'artiste considérait probablement comme des études ses esquisses à l'aquarelle et un croquis à l'huile de Joseph Brant en buste (fig. 7, 8 et 9). Les difficultés financières de Berczy durant cette période diminuèrent ses chances de peindre un chef-d'oeuvre. (29) Pourtant, ces portraits humanistes de Joseph Brant traduisent la tentative de l'artiste d'exalter la valeur personnelle de Brant indépendamment de toute distinction de rang et devraient être considérés comme des oeuvres importantes en soi.

Le tondo miniature à l'aquarelle qui représente un portrait en buste et fait partie de la collection du Château de Ramezay à Montréal (fig. 7), ressemble à l'aquarelle miniature de la collection du Séminaire de Québec (fig. 8) et en est considérée depuis peu comme une autre version, (30) attribuée à William Berczy; il s'agit probablement des esquisses les plus anciennes, qui remontent à 1794-1797 environ. Dans la version du Séminaire de Québec, Brant porte une médaille en argent autour du cou, ainsi qu'une plume et un ruban attachés à sa chevelure, tandis que sur le tondo du Château de Ramezay, on ne remarque aucune trace de médaille.

Le Musée royal de l'Ontario (MRO) possède un tondo à l'huile qui représente Brant en buste (fig. 9), peint de trois-quart du côté droit; (31) on croit qu'il s'agit de l'esquisse préliminaire pour le tableau de la collection Pitfield (32) (fig. 10). Brant porte un ruban attaché à sa chevelure, ainsi qu'un manteau militaire anglais, une écharpe sur l'épaule et, à l'oreille droite, une boucle en argent. Tout l'accent est mis sur son visage et le froncement des sourcils.

Sur les tondos à l'huile de la collection Pitfield et de celle du MRO figurant Brant en buste, ce dernier porte les mêmes vêtements et la même boucle en argent, auquels s'ajoute, dans le cas de la peinture de Pitfield, la médaille offerte par George III. Sur les oeuvres des collections Pitfield et du MRO, Brant tient un tomahawk, qui, en l'absence du costume traditionnel, paraît anachronique. Le tableau de la collection Pitfield était sûrement la dernière esquisse préparatoire à une suite de gravures, probablement jamais exécutées. (33) Berczy a fait ostensiblement porter à Brant une plume dans sa chevelure, qui n'apparaît pas dans la version du MRO. Il a apporté un soin méticuleux à l'apparence sculptural du visage, lui donnant la puissance d'expression d'un bas-relief néoclassique et révèle avec précision, à partir de la physionomie de Brant, ses traits de caractère fondamentaux. Il se peut que Berczy ait été influencé par des gravures.

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