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Un
festival en gestation (1975)
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Voilà
plus de douze ans qu'il est revenu de ce voyage en Europe
qui a bouleversé sa vie. Ce voyage au cours duquel
le père Lindsay a découvert les festivals, les
voix et la griserie d'être au cur d'une vraie
célébration de la musique mettant en vedette
les plus grands artistes du monde.
Pendant
toutes ces années où il a attendu le moment
propice pour offrir, à la région qu'il a adoptée,
sa fête de la musique, il ne s'est pas tourné
les pouces. Il a préparé le terrain, semé
et arrosé cette terre qui allait devenir, à
force de travail, un véritable sol de musique. En bon
jardinier, il a su créer un environnement favorable
à l'épanouissement des plantations dont il avait
couvert la région.
Le
Camp musical, le Festival-Concours et le Centre culturel avaient
produit de bons fruits. Il pouvait maintenant s'atteler à
cette tâche dont il rêvait depuis si longtemps
et cultiver un nouveau carré de jardin. Il deviendrait
une sorte de complément de programme et poursuivrait
simplement le mouvement déjà entrepris, des
dizaines d'années auparavant, par des gens qui, comme
lui, croyaient que la musique était une chose qu'il
fallait partager.
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Un
événement fortuit
Nous
sommes à l'été de 1977, le père
Lindsay reçoit un appel du directeur de l'OSM (Orchestre
symphonique de Montréal) qui est à la recherche
d'une salle pouvant accueillir l'Orchestre afin de compléter
sa programmation estivale. Elle ne peut, tel que prévu,
se produire à l'aréna Maurice Richard qui a
retenu les services d'une autre formation. Le père
Lindsay propose alors de produire trois concerts à
la Cathédrale de Joliette et d'offrir pour la première
fois des activités musicales en saison d'été.
La
salle se remplit et le public en redemande. Il n'en fallait
pas plus pour lancer ce qui allait devenir l'année
suivante le Festival d'été de Lanaudière.
Le
Festival d'été de Lanaudière
Encouragé
par les pressions de mélomanes qui insistent pour que
les concerts d'été se poursuivent, le père
Lindsay prépare une programmation pour la saison 1978.
Placée sous le thème Air d'été,
elle sera l'occasion de célébrer le 150e
anniversaire de naissance de Schubert.
Huit
concerts seront présentés entre le 4 juillet
et le 22 août dont un mettant en vedette la jeune violoniste
de 16 ans, Angèle Dubeau, accompagnée par l'OSM.
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Le
père Lindsay ne peut tout faire seul. Il est entouré
de bénévoles déjà présents au
sein des autres organismes dont il a la charge et d'anciens confrères
du Séminaire. Deux amis les rejoignent bientôt et ils
s'avèrent très vite de précieux collaborateurs
: René Charrette, directeur de la Société nationale
des Québécois de Lanaudière et Marcel Masse,
alors vice-président chez Lavalin.
Rapidement,
il est décidé de structurer l'organisme, de lui donner
un statut légal, de former un conseil d'administration et
de voir grand. En 1979, Marcel Masse se retrouve président
de la corporation, René Charrette, vice-président
et le père Lindsay directeur artistique, poste qu'il occupe
depuis ce jour.
Pour
qu'un festival marche bien, confie Marcel Masse à Simone
Piuze (Actualité, 1987), il faut à tout prix cette
symbiose de l'aspect artistique et de l'aspect administratif.
C'est à cette tâche que s'attèle dès
le départ l'équipe du Festival. Le conseil d'administration
devra donc travailler fort et en étroite collaboration avec
le père Lindsay qui est le seul permanent de l'organisation.
Encore qu'il ne l'est qu'à temps partiel puisqu'il est toujours
enseignant au Cégep de Joliette et directeur du Centre culturel
et du Camp musical.
Même
si le Festival n'est au départ que régional, le conseil
d'administration pense déjà à en faire un événement
national, voire international.
Des
saisons qui se suivent et ne se ressemblent pas
La
saison de 1979 comprend 35 concerts qui sont présentés
à la Cathédrale, mais également à l'auditorium
du Cégep, au Camp musical et dans quelques églises
de la région. Elle est dédiée à Beethoven
et inclut à nouveau des concerts de l'OSM. La saison suivante
est consacrée à Mozart
et les années
se suivent emportant leurs lots de surprises.
Les
concerts dans les églises se font de plus en plus nombreux,
et les artistes invités, de plus en plus prestigieux. La
programmation ne cesse de se diversifier. Le budget augmente et
la clientèle, qui vient de plus en plus loin, suit le ryhtme.
Le Festival grandit donc d'été en été.
Un
directeur général: Paul Dupont-Hébert
Le
conseil d'administration a beau être très impliqué
dans les décisions, dans les applications, et jouer
un rôle de gestionnaire, le père Lindsay peut
bien se tenir au courant de toute la vie musicale, lire les
revues et établir des contacts régulièrement
afin de concevoir de superbes programmations, le Festival
manque néanmoins de moyens et croule sous la tâche.
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Si
le Festival veut grandir comme le souhaite ses organisateurs, il
faut pouvoir donner les coudées franches à chacun.
En 1984, il est donc décidé d'embaucher un directeur
général et c'est l'imprésario et organisateur
de spectacles Paul Dupont-Hébert qui obtiendra le poste.
Le père Lindsay dira alors que son embauche a été
le dernier tournant qui a fait que le Festival a pris son élan.
Débute
alors ce que nous pourrions appeler une vaste campagne de séduction.
Il faut attirer les gens et pour les attirer quoi de mieux que
d'organiser des concerts gratuits qui vont les surprendre. C'est
ainsi que sont notamment présentés les spectacles
de Fabienne Thibault avec les Chanteurs de la Place Bourget
et de Francis Cabrel, accompagné par une chorale de 350
enfants de la région. |
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Nous
retrouvons dans ces spectacles deux préoccupations qui sont
chères au père Lindsay. D'abord les voix, qu'il apprécie
particulièrement et qui se feront très présentes
dans la programmation du Festival. Non seulement les churs,
mais également les solistes comme Gino Quilico, Marilyn Horne,
Renata Scotto, Carol Neblett, Vladimir Popov et, à ne pas
oublier, Julia Migenes-Johnson et Wilhelmenia Fernandez.
Et
puis, le souci de présenter des artistes de Lanaudière.
C'est d'ailleurs dans cette ligne de pensée qu'il forme le
Chur du Festival qui se produit à chaque saison à
l'amphithéâtre.
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Un
directeur artistique: le père Lindsay
La
priorité du père Lindsay est de concevoir une
programmation intéressante qui attirera les mélomanes.
Elle doit être équilibrée et pensée
en fonction d'une clientèle qui ne proviendra pas nécessairement
de la région immédiate. Il faut donc regarder
du côté de Montréal.
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Et
pour attirer ces spectateurs et les convaincre de se déplacer
vers Joliette, il vaut mieux être en mesure de pouvoir offrir
de gros noms, des vedettes et des concerts-événements
hors de l'ordinaire. Il faut aussi trouver des musiciens qui ne
se sont jamais produits dans la métropole ou encore qui n'y
sont pas venus récemment.
Le
père Lindsay avoue y penser tout le temps et il profite
de toutes les occasions pour établir des contacts. Il
ne peut, surtout dans les premières années du
Festival, faire de nombreux voyages à l'étranger.
Il doit donc lire beaucoup, s'informer et être à
l'affût de tout renseignement pouvant le mettre sur la
piste d'un artiste intéressant pour le Festival. Heureusement,
il connaît le milieu et les musiciens et il les aime.
Et réciproquement on le connaît et on l'aime. |
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Voici
une citation du père Lindsay tirée de Étude
de cas "Le Festival d'été de Lanaudière
(1988)" réalisé par l'École des Hautes
Études Commerciales qui illustre bien la conception du père
Lindsay quant à la programmation:
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Il
faut essayer de découvrir ce qui est bon et ce qui
plaît au public. Mais là, c'est en voulant se
faire plaisir qu'on essaye d'identifier le goût du public
avec le nôtre.
Il
faut avoir envie de réaliser quelque chose en gardant
en tête la mission: faire la plus belle musique possible
en réunissant les meilleurs musiciens. Des grands noms,
bien sûr, mais il faut penser aux musiciens québécois,
canadiens sans compter les jeunes issus de la tradition musicale
de Joliette.
Je
sais ce que je fais. Ce que j'ai le goût d'entendre,
ce que j'ai le goût de faire, ça devrait marcher.
Je suis tellement convaincu quand je dis que c'est beau et
que le produit est bon, que ça va marcher. C'est ainsi
que je réussis à convaincre le conseil d'administration.
F.L.
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[SUITE]
Un
tournant pour le festival : la saison 1985
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