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Origine de l'exploitation minière dans la région d'Asbestos Page 3
Évolution de l'industrie de l'amiante
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La mine en 1890
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Durant les années 1880, la production d'amiante augmenta de façon constante. Au cours de cette période, la production de la mine Jeffrey fut en moyenne de 400 tonnes par années. En 1887, la production de la mine Jeffrey la plaçait au quatrième rang chez les producteurs québécois d'amiante. L'augmentation des prix représentait évidemment un stimulant à la production.
Cette manne de l'amiante attira les promoteurs et les spéculateurs22. La fièvre atteindra même quelques politiciens23. Ainsi, avec la croissance du marché de l'amiante durant cette période, Jeffrey n'est plus seul à vouloir exploiter ce coin du canton de Shipton, que tous supposaient riche en amiante. Autour des années 1891, la St. Cyr Asbestos Mining Company Limited de Pennsylvanie exploitait sous le nom de Coulston Mine une partie des terres de William Webb24. Ce projet de mine fut d'abord amorcé par Narcisse Noël qui avait acquis les droits de Webb en janvier 189125. À l'été 1891, J. Warren Coulston, de Philadelphie, président de la St. Cyr Mining, prenait la relève de Noël26. L'événement majeur du début des années 1890 fut la fusion de l'ensemble des compagnies manufacturières d'amiante des États-Unis qui prit le nom de H.W. Johns' Manufacturing Company27. Ce type de regroupement s'était déjà produit quelques années plus tôt dans le cas des compagnies anglaises
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La mine en 1910
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avec la formation en 1879 de la United Asbestos de Londres28. La nouvelle compagnie américaine contrôlait une part assez importante de la production des mines québécoises pour influencer les prix de la fibre brute. Dans le cas de la mine Jeffrey, c'est l'ensemble de la production qui prend le chemin de la H.W. Johns de New-York, presque dès les débuts de l'exploitation29. En 1892, les prix chutèrent de façon abrupte que plusieurs attribuèrent au nouveau monopole d'achats américains (H.W Johns). La baisse des prix de l'amiante eut pour effet d'éliminer les petites mines moins bien exploitées, d'encourager la recherche pour de nouvelles utilisations des fibres rejetées et de stimuler l'adoption de nouvelles techniques de production. Dorénavant, l'économie d'échelle et la capacité financière pour détenir des actions vont devenir des facteurs déterminants. L'application de cette nouvelle façon de faire nécessitait des ressources financières importantes, ce que Jeffrey ne possédait pas vraiment. Déjà endetté, Jeffrey ne sera pas en mesure d'assurer le passage de l'exploitation d'une phase artisanale à une phase industrielle.
Consolidation de l'industrie de l'amiante (1893-1900)
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La mine en 1900
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En 1892, William Jeffrey se décide finalement à acheter la propriété de Webb qu'il exploite depuis plus d'une décennie tout au long de laquelle la production ainsi que les prix n'avaient cessé d'augmenter. Ce qui n'avait été au départ qu'une curiosité minéralogique était maintenant devenu la base d'une industrie en pleine croissance. La prochaine décennie fut marquée par la première crise commerciale qui apporta avec elle des bouleversements au niveau de la propriété dans les mines d'amiante. Ces changements obligèrent les compagnies à s'engager dans toute une suite d'innovations techniques et mécaniques. On assista à tout un mouvement de fusions de compagnies dans l'ensemble de l'industrie de l'amiante, de même qu'au contrôle de plus en plus important du capital américain sur cette même industrie.
Départ de Jeffrey
Suite à de graves problèmes financiers causés, entre autres, par la chute drastique du prix de l'amiante, Jeffrey déclare faillite en 1893. Au printemps 1894, c'est James Naismith Greenshields qui prend possession de la mine et des installations que Jeffrey avait exploitées durant quatorze ans30. J.N. Greenshields n'était pas un inconnu par les gens de la région. En effet, il était reconnu comme l'un des meilleurs avocats de pratique de droit criminel et commercial de son époque. Bien qu'installé à Montréal, Greenshields gardait un pied à terre à Danville : il possédait un véritable domaine nommé Isaleigh Grange Farm. Ami personnel de Wilfrid Laurier, il se présenta, en 1887, aux élections fédérales comme candidat Libéral dans le comté de Richmond-Wolfe. Il perdit aux mains du conservateur par moins de 137 voix. Comme on peut le constater, ses activités ainsi que ses relations politiques faisaient de Greenshields un homme extrêmement influent31.
La carrière d'ardoise de Danville, la Danville Slate Company, acculée à la faillite à l'été 189132, fut aussi achetée par Greenshields au début de 1893, qui fusionna cette dernière à la mine Jeffrey.
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22 |
André-Napoléon Montpetit, op.cit., p. 7; Comté de Wolfe, Registre B10, no 1578, p. 306 et Registre B21, no 20769, p. 898. Bureau d'enregistrement (propriétés-droits réels) de Richmond; Robert Armstrong, op.cit., p. 30. |
23 |
Marc Vallières, op. cit., p. 98; Robert Armstrong, op. cit., p. 27-30; Rapport des opérations minières du Québec, 1886, p. 72; cité dans François Cinq-Mars, et.al., op.cit., p. 95. |
24 |
Procès verbaux Livre 1; 9 mars 1899 au 11 mars 1909, 3 juillet 1900; 9 juillet 1901; 3 septembre 1901. |
25 |
Marc Vallière, op.cit., p. 96; W.J. Woolsey, « Asbestos History », The Canadian Mining Journal, November 1, 1912, p. 746; cité dans Robert Armstrong, op.cit., p. 26-27. |
26 |
ANQ, Greffe du notaire F.A. Brien, actes no 10321; no 10643; no 11285; no 11284; Frère Fabien, op.cit., p. 40; Registre B20, no 1016, p. 88; Registre B23, no 499-503, p. 521-522 et p. 528-529. Bureau d'enregistrement (propriétés-droits réels) de Richmond. |
27 |
Robert H. Jones, Asbestos and Asbestic: Their Properties, Occurence and Use, London, Crosby, Lockwood and Son, 1897; et « Early Asbestos Days in Boston », Asbestos, Philadelphie, vol. 9, no 5 (November, 1927), p. 29; cité dans Robert Armstrong, op.cit., p. 32. |
28 |
Marc Vallières, op.cit., p. 95. |
29 |
Registre C, vol.1, no 214. Bureau d'enregistrement (propriétés-droits réels) de Richmond; Robert Armstrong, op.cit., p. 26-32. |
30 |
Registre b22, no 730, p. 767-769. Bureau d'enregistrement (propriétés-droits réels) de Richmond; Eastern Townships Bank, 50th Anniversary 1859-1909, Fiftieth Annual Report 1909, with a Brief History of the Bank, Sherbrooke, 1909, p. 130; Registre B23, no 27, p. 31-32. Bureau d'enregistrement (propriétés-droits réels) de Richmond. |
31 |
Sherbrooke Daily Record, Friday, September 13, p. 3; Henri James Morgan, The Canadian Men and Women of the time: A hand book Canadian biography of living Characters, First edition, Toronto, William Briggs, 1898. p. 407. |
32 |
Registre B22, no 133, p. 130. Bureau d'enregistrement (propriétés-droits réels) de Richmond. |
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