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LA VISION SE PRÉCISE : LES HÉROS DES ANNÉES 1980 ET 1990

À la fin de 1979, Richard Comely (qui travaillait pour un nouvel éditeur, CKR Productions) rassembla l'équipe qui allait créer les aventures les plus réussies de Captain Canuck : Comely lui-même en tant que rédacteur en chef, George Freeman comme dessinateur principal, et Jean-Claude St-Aubin comme coloriste principal et encreur. Leur plus belle réussite fut probablement « Chariots of Fire », une histoire présentée dans les nos 11 à 13 de Captain Canuck.

« Chariots of Fire » explorait davantage les origines de Canuck et tentait de redéfinir le personnage en le ramenant des années 1990 au début des années 1980. En remettant en scène les extraterrestres qui avaient donné à Canuck, par inadvertance, ses pouvoirs surhumains, Comely pouvait également introduire une machine à voyager dans le temps qui projetait Canuck en l'an 1040, où il aidait les Mi'kmaqs [Micmacs] à repousser une invasion des Vikings. Ainsi, en faisant disparaître Canuck de l'année 1995, Comely pouvait à la fois représenter la mort apparente du superhéros et approfondir le sens de l'héroïsme. Dans une séquence réalisée de main de maître, vers la fin de l'histoire, la BD alterne entre les efforts des forces terrestres de 1995 pour contrer une invasion d'extraterrestres et ceux de Canuck et des Mi'kmaqs pour repousser les envahisseurs nordiques (la partie de la séquence qui se déroule au XIe siècle était brillamment dessinée par Freeman, dans un style qui rendait hommage à la BD classique de Harold Foster, Prince Valiant). L'histoire se terminait lorsque Canuck venait aider les forces terrestres de 1995, puis franchissait le mur du temps et entrait dans l'année 1980.

Malheureusement, au moment même où Canuck arrivait dans l'année 1980, CKR Productions fermait ses portes et le superhéros disparaissait des librairies et des kiosques américains et canadiens. Déplorée dans la presse spécialisée, la disparition de Canuck survenait alors que ses créateurs apportaient une assurance et une maturité nouvelles à la BD. Le dernier numéro (no 14, en mars 1981) était paru peu de temps avant une profonde réorganisation du marché nord-américain de la BD, qui allait profiter à des éditeurs parallèles tels que CKR. Quoi qu'il en soit, quiconque aurait l'intention de créer un superhéros national canadien pourrait toujours se référer à la dernière partie de cette BD. En fait, beaucoup d'amateurs de Captain Canuck doutent qu'un autre artiste puisse surpasser l'œuvre de George Freeman et son dynamisme joyeux.

Alors que Canuck disparaissait, d'autres superhéros nationaux arrivaient sur la scène, mais ces personnages n'étaient pas marqués par l'influence du travail de Comely, Freeman et Saint-Aubin. Ce n'est que plus tard au cours de la même décennie que l'impact de Captain Canuck se fit sentir.

CAPTAIN CANADA

Le premier de ces nouveaux héros fut Captain Canada, d'Apache Communications. Créé par Geoffrey Stirling et son fils Scott, deux cadres des médias de Terre-Neuve, Captain Canada apparut pour la première fois en 1980 dans la BD « Captain Newfoundland » du Sunday Herald de St. John's. Cette BD, dessinée par Danny Bulanadi, un artiste américain, fut ensuite publiée dans la revue Captain Newfoundland (1981). Ce n'est que lors de la publication, quelques années plus tard, du " graphic novel " Atlantis, réunissant les deux capitaines, que le personnage fut vraiment mis au point par les Stirling.

Comme Captain Canuck, Captain Canada portait un costume rouge et blanc inspiré du drapeau. Jeune homme appelé Daniel Eaton dans la vie de tous les jours, Captain Canada avait été recruté par le plus puissant des personnages créés par les Stirling, Captain Atlantis. En fait, de nombreux autres personnages se joignirent à Captain Canada, notamment un superhéros canadien autochtone, Captain Freedom, et une superhéroïne québécoise, Mademoiselle. Si Captain Canada ressemblait, à certains égards, aux autres superhéros – il avait sauvé la reine Elizabeth et le prince Charles des griffes d'un robot japonais géant lors d'une bataille épique détruisant une partie du centre-ville d'Ottawa – il tranchait sur tous les autres.

Ce qui rendait si différente la version du superhéros national proposée par Apache Communications, c'était à la fois le contenu de la bande elle-même et la promotion du personnage. Sur le plan du contenu, les Stirling n'avaient aucune intention de créer un superhéros traditionnel de BD. Captain Canada représentait pour eux un moyen de populariser certaines idées philosophiques et religieuses. Tout en créant des aventures passionnantes visant à inculquer des sentiments de patriotisme à tous les jeunes Canadiens, les Stirling exploraient aussi des croyances mystiques complexes ainsi que la nature du bien et du mal. Quant à la promotion du personnage des Stirling (qui signaient Geoffrey Scott), elle débordait le marché de la BD. Profitant de leur expérience et de leurs contacts dans les médias, ils essayaient de donner un public plus important au personnage en réalisant des émissions de télévision et en présentant un acteur vêtu comme Captain Canada. Pourtant, bien que leur Captain Canada ait peut-être été vu par plus de Canadiens que la plupart des autres superhéros du pays, le personnage n'a guère marqué la tradition du superhéros national dans l'art de la BD canadienne.

ALPHA FLIGHT

La seconde tentative de création d'un superhéros national canadien dans les années 1980 fit apparaître Alpha Flight, une pléiade de superhéros de John Byrne. Byrne était un artiste et auteur canadien qui avait déménagé aux États-Unis pour poursuivre une carrière dans le milieu new-yorkais de la BD. À la fin des années 1970, il était devenu l'un des artistes les plus populaires dans ce domaine. Au début de sa carrière, alors qu'il était encore au Canada, Byrne avait parlé de son désir de créer des héros canadiens.(6) Il dut attendre d'être solidement établi dans l'industrie américaine de la BD avant de pouvoir réaliser son rêve. Quand il entreprit finalement la création de héros canadiens, il apporta à son travail une énergie telle qu'il créa non point un, mais de nombreux personnages, tels qu'Aurora, North Star, Sasquatch, Shaman, Snow Bird et celui qui se rapprochait le plus d'un superhéros national, Vindicator (plus tard Guardian).

Les premiers travaux de Byrne sur Alpha Flight parurent à la fin des années 1970 dans la revue de BD américaine X-Men, mais ce n'est qu'en août 1983, avec la publication d'Alpha Flight, qu'il commença à étudier ses personnages plus à fond. Byrne était, et demeure, un professionnel consommé, mais Alpha Flight était trop proche de la tradition du superhéros américain pour répondre vraiment à la demande de superhéros canadiens. Ce problème devint encore plus apparent lorsque Byrne abandonna cette BD après le no 28. Il convient de noter qu'Alpha Flight demeure la plus longue série du genre mettant en scène des superhéros canadiens (la première série s'est terminée en 1994 avec le no 103; une deuxième série, comprenant 20 numéros, est parue entre 1997 et 1999). Alpha Flight est d'ailleurs reconnu pour sa représentation du premier superhéros ouvertement homosexuel – Northstar – qui s'est affiché dans le no 106 (avril 1992).

NORTHGUARD

L'Alpha Flight original de Byrne a assurément influencé le milieu canadien de la BD au milieu des années 1980. Mark Shainblum, jeune auteur et éditeur montréalais, qui avait été un grand admirateur de Captain Canuck, voyait, dans les travaux de Byrne, un exemple de l'antipode du superhéros purement canadien. Selon Shainblum, un tel héros ne devait pas être simplement un superhéros de style américain en costume canadien. La vision la plus mûre du véritable superhéros canadien était en train de prendre forme.

Le succès de la nouvelle interprétation du superhéros national par Shainblum était attribuable en partie à la connaissance que l'artiste avait de la tradition précédente. Shainblum connaissait l'Alpha Flight de Byrne, ainsi que Nelvana et Johnny Canuck, et il était en contact avec les créateurs de Northern Light et de Captain Canuck. Il connaissait aussi le Captain Canada des Stirling et Capitaine Kébec, le personnage satirique créé par Pierre Fournier. Il avait d'ailleurs publié dans Orion, son magazine de science-fiction et de BD, une parodie de Captain Canuck (le Captain Canduck de John Bell et d'Owen Oulton) ainsi que des références à ses propres superhéros nationaux – un personnage dans le style des années 1940, nommé Red Ensign, et un héros contemporain, Northguard.

Geoff Isherwood fut le premier artiste à collaborer avec Shainblum à la conception de Red Ensign et de Northguard. Après la disparition d'Orion en 1982, les deux créateurs concentrèrent leurs efforts sur Northguard. Avant que leur nouveau superhéros n'ait pris forme, Isherwood se trouva une place dans le monde de la BD à New York et abandonna le travail de conception du personnage. Peu de temps après, Shainblum fit équipe avec Gabriel Morrissette, un graphiste montréalais. Ensemble, ils redéfinirent le personnage de Northguard, en délaissant bon nombre de clichés et en s'écartant de l'idée originale conçue par Shainblum et Isherwood.

Dès le début, ils étoffèrent le personnage en lui donnant une identité et un milieu et s'efforcèrent de parvenir à un degré élevé d'authenticité et de réalisme. Northguard (dont l'alter ego était un jeune étudiant nommé Phillip Wise) était donc un personnage réaliste, et ses aventures se déroulaient dans un Montréal aisément reconnaissable. Alors que certains artistes et auteurs utilisaient des images urbaines toutes faites, Shainblum et Morrissette parcouraient la ville pour la photographier, si bien que les édifices dans lesquels Northguard pénétrait, en général, existaient réellement. C'est ce souci de la vraisemblance qui rendait la BD d'autant plus convaincante. Si les aventures de Northguard étaient plus plausibles que celles de la plupart des superhéros, elles n'avaient rien de banal.

L'unique histoire de Northguard créée par Shainblum et Morrissette était une aventure compliquée en huit épisodes, qui commença en 1984-1986 dans cinq numéros de New Triumph Featuring Northguard, publiés par Matrix Graphic Series de Shainblum lui-même, de 1984 à 1986 et qui se termina dans trois numéros de Northguard, publiés par l'éditeur américain Caliber Press en 1989-1990. Si cette longue histoire était avant tout une aventure de superhéros, elle empruntait aussi beaucoup à la littérature à sensation, plongeant Northguard dans un monde trouble d'intrigues politiques auxquelles participaient des gouvernements étrangers, des sociétés multinationales et une menaçante organisation de droite appelée ManDes (Manifest Destiny).

L'histoire commençait par l'enlèvement de Wise qui était amené à Vaudreuil, au siège social d'une multinationale canadienne, Progressive Allied Canadian Technology (PACT). Wise y apprenait qu'une menace de prise de contrôle par la mystérieuse organisation ManDes planait sur le Canada et que PACT avait élaboré un système révolutionnaire d'armes individuelles cybernétiques appelé Uniband. Grâce aux ondes émises par son cerveau, Wise possédait la capacité de manier cette arme qui avait la puissance de feu d'un bataillon. PACT voulait engager Wise pour qu'il utilise l'Uniband dans la bataille imminente contre ManDes. Passionné de BD, Wise acceptait, mais à la condition qu'on lui permette d'utiliser l'Uniband en tant que superhéros, et pas n'importe lequel. Wise était un grand admirateur de Captain Canuck et d'Alpha Flight, et il voulait donc être un superhéros national arborant un costume représentant le drapeau. PACT céda finalement à sa demande et Northguard naquit.

Dans le rôle de Northguard, Wise se trouva rapidement entraîné dans un tourbillon de violence. Dans le combat contre ManDes et ses hommes, il fut rejoint par Manon Deschamps, spécialiste des arts martiaux, qui adopta l'identité de Fleur de Lys, superhéroïne nationale québécoise (probablement le personnage de héros francophone sérieux le plus approfondi jamais créé). Northguard sauva le premier ministre du Québec, René Lévesque, d'une tentative d'assassinat à un rassemblement politique au Forum de Montréal, puis fut lui-même sauvé par un autre agent de PACT des griffes d'agents secrets soviétiques et américains. Shainblum et Morrissette montraient que le métier de superhéros n'était pas de tout repos. Phillip Wise, le passionné de lecture, faisait des pieds et des mains pour devenir un guerrier – pour vivre les aventures fantastiques des BD – mais il fut vite dépassé par les événements, car il fut capturé par ManDes, qui voulait l'utiliser avec l'Uniband contre PACT et le Canada. Le superhéros sauveur fut alors transformé en destructeur virtuel de son propre pays – Phillip et l'Uniband seront employés pour déclencher une énorme explosion nucléaire. Au tout dernier moment, Phillip réussit à s'assurer du contrôle de l'arme et détruisit ManDes, devenant ainsi le héros qu'il avait rêvé d'être. L'histoire se terminait par une scène où Phillip, désabusé et troublé par ses aventures, repoussait une offre du Service canadien du renseignement de sécurité qui voulait le recruter.

En situant leur œuvre dans le monde réel et en étudiant la rançon de l'héroïsme, Shainblum et Morrissette ont probablement réalisé la représentation la plus recherchée jamais faite d'un superhéros national canadien. Shainblum écrivait avec une honnêteté et une sobriété en accord avec le dynamisme et le réalisme des dessins de Morrissette. Entre leurs mains, une symbiose s'établissait entre le dessin et l'histoire, entre l'art et le texte. Malheureusement, les deux créateurs cessèrent de représenter ce personnage en 1989.

LES ANNÉES 1990

À la suite de la disparition de Northguard, les superhéros nationaux du Canada ont été en grande partie inactifs jusqu'en 1992, lorsqu'ils furent mis en vedette dans l'exposition de John Bell intitulée Protecteurs du Nord : Le superhéros national dans la bande dessinée canadienne (Musée canadien de la caricature). Protecteurs du Nord, qui a été la première exposition à explorer une thématique particulière de la tradition canadienne des BD, a suscité un intérêt énorme à propos de l'histoire des superhéros canadiens. En conséquence, Postes Canada a émis une collection spéciale de timbres, en 1995, commémorant Superman et quatre superhéros nationaux : Nelvana, Johnny Canuck, Captain Canuck et Fleur de Lys. Ce n'est pas étonnant que certains créateurs de superhéros canadiens aient songé au retour de leurs personnages.

À l'automne 1993, Richard Comely a relancé Captain Canuck en lui donnant une nouvelle identité (Darren Oaks) et en l'opposant à une conspiration internationale singulière. Malheureusement, ce nouveau héros n'avait pas le panache du Captain Canuck classique de Freeman et de Saint-Aubin. Après être apparu dans quelques revues de BD (publiées par Semple Comics de Comely) et dans une BD de courte durée pour journal, le nouveau Canuck, tout comme son regretté prédécesseur, a disparu.

En 1998 et 1999, Mark Shainblum, cocréateur de Northguard et collaborateur à la BD (pour journal) de Captain Canuck, s'est associé au dessinateur de BD Sandy Carruthers, de l'Île-du-Prince-Édouard (lequel a aussi travaillé brièvement à la BD de Canuck), dans le but de ressusciter et de restructurer le Captain Canuck original (Tom Evans). En fait, Shainblum et Carruthers ont fait une histoire complète pour BD, mettant en vedette leur « Nouveau Captain Canuck original ». Même si une partie de cette histoire est parue dans une petite critique promotionnelle de BD (une soi-disant « ashcan ») ayant une distribution très limitée (100 exemplaires), l'histoire n'est pas terminée. Avec un peu de chance, cette version (nouvelle/ancienne) de Canuck sera un jour publiée intégralement. Ce sera fascinant de voir le Captain Canuck de Shainblum, car celui-ci sait représenter ses personnages avec maturité et profondeur.

Si le Northguard de Shainblum et de Morrissette incarnait un superhéros national canadien en pleine maturité et de première classe, il en était autrement d'autres personnages semblables. Contrairement à Northguard (Phillip Wise), un jeune homme très sérieux, certains autres superhéros étaient des êtres irrespectueux, créés pour ridiculiser notre conception de l'héroïsme et de l'identité nationale.

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