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Le
travail n'y faisait pas défaut. Entre 1940 et 1966, date à laquelle
fla base ferma ses portes, plusieurs milliers de personnes non
militaires y furent employées. Au plus fort de la construction
de la base, entre 1500 et 2000 civils y trouvèrent un emploi,
et à mesure que le temps passait, ils tenaient des rôles parfois
d'une grande responsabilité. Si les Français n'occupaient pas
de postes de cadre, ils contribuaient beaucoup à la main-d'oeuvre
générale, mettant à profit leurs talents naturels de charpentier
ou de plombier -et recevant, le cas échéant, une formation dans
le métier nécessaire. Pour la première fois, les habitants de
cette région avaient accès facile aux avantages de la grande économie
américaine, et tout naturellement ils y prenaient goût. Mais sur
le plan de la culture, il y avait des conséquences que l'on n'avait
pas prévues.
Tout
d'abord, les Acadiens, pour qui les environs de Stephenville avaient
fourni des terres fertiles, virent celles-ci balayées pour faire
place aux pistes d'atterrissage. Certains restèrent à travailler
pour le compte des Américains, d'autres choisirent une vie commerciale,
dans l'hôtellerie, par exemple. D'autres déménagèrent carrément,
les uns allant vivre sur la presqu'île, les autres cherchant de
nouvelles terres plus éloignées de Stephenville, à Kippens, par
exemple. Pour ceux qui restaient dans la ville, il y avait certes
la possibilité d'une meilleure vie matérielle, mais au prix d'être
engloutis non seulement par les Américains avec leur culture et
leur langue, mais aussi par les nombreux étrangers, presque toujours
anglophones, qui vinrent s'installer à Stephenville, attirés par
la possibilité d'y faire fortune. La culture acadienne s'y trouvait
submergée.