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Ces
déserteurs étaient en général des célibataires. Pour fonder des
foyers, il leur fallait des épouses, et celles-ci pouvaient se
trouver sans trop grande difficulté, dans le petit nombre de familles
qui venaient directement de St-Pierre s'installer sur la presqu'île.
En principe, une fois leur service à la pêche terminé, les pêcheurs
qui étaient venus à Terre-Neuve en passant par St-Pierre, devaient
retourner en France. Certains préférèrent retourner à Terre-Neuve,
mais pour ce faire ils durent parfois avoir recours à la fuite
clandestine.
Les
témoignages émouvants d'un vieux pêcheur franco-terreneuvien appuient
ce fait. Monsieur Frank Woods, né Francis Dubois à St-Pierre en
1893, m'a raconté comment son père, pilote à St-Pierre et terminant
son service, et qui devait retourner en France (il était natif
de St-Malo), s'est enfui, lui et toute sa famille, par une nuit
de tempête, poursuivi par des vaisseaux français, pour réussir
à atteindre la côte ouest de Terre-Neuve, dans la baie des Îles,
où ils devaient se fixer. Frank Woods avait six ans à l'époque,
mais se rappelle très bien le caractère dramatique de l'événement.
Plus tard, la famille déménageait pour aller vivre sur la presqu'île
de Port-au-Port. Charles de la Morandière fait état lui aussi
des témoignages documentaires semblables, notant entre autres
qu'une famille de Poirier s'échappa de St-Pierre, pour chercher
refuge aux îles de la Madeleine, en 1819. Il faut souligner que
ceux qui quittèrent St-Pierre pour se rendre à la presqu'île connaissaient
déjà ses parages, pour y avoir travaillé long temps.
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