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Traçons
donc l'évolution des deux groupes. Je me pencherai d'abord sur
le sort des Acadiens, et si je passe plus rapidement sur leur
sort que sur celui des Français de la presqu'île, c'est parce
que ces derniers sont les porteurs de la tradition que j'examinerai
ici.
Je
rappelle au lecteur que ce fut en 1755 que les Anglais, qui avaient
acquis l'Acadie en 1713, se décidèrent, pour des raisons que nous
ne discuterons pas ici, à déposséder les Acadiens de leurs terres.
Ce fut la période du " grand dérangement ". Chassés de leur jeune
pays, de nombreux Acadiens s'installèrent en Louisiane; d'autres
furent ramenés en France; d'autres encore purent s'échapper des
mains des Anglais, se cachant dans les bois jusqu'à ce qu'ils
trouvent de nouvelles terres. C'est ainsi que se constituèrent
les noyaux acadiens des provinces maritimes actuelles de la Nouvelle-Écosse,
du Nouveau Brunswick, et de l'Île-du-Prince-Édouard.
Au
milieu de ce remue-ménage, un petit nombre de familles acadiennes
se fixèrent à Terre-Neuve, à l'intérieur de la baie St. Georges,
aux environs des villes actuelles de Stephenville et de St. Georges.
Il existe des documents qui attestent la présence d'au moins deux
familles dans la région, dès 1770. Mais il faut attendre les premières
décennies du dix-neuvième siècle pour avoir des faits plus solides.
En effet, Charles de la Morandière, se servant de documents de
la Marine française, nous apprend qu'en 1821, il se trouvait treize
familles au havre de St. Georges et cinq au Grand Barachois. L'officier
dont le rapport fut consulté par de la Morandière note également
que quelque quarante ans auparavant, vers 1780, il ne s'y trouvait
que deux familles, une dans chaque endroit. Mais le rapport n'indique
pas la nationalité de celles-ci.