Le Vaisseau Fantôme
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3/4

Ces vaisseaux qu'on appelle fantômes
Robert De La Croix
p.103 à 112

(suite 3)

En 1904, l'équipage du trois-mâts Emilie Galline, doublant le Cap Horn, eut une vision semblable: un navire entier était encastré dans un iceberg. Et c'est peut-être encore à un iceberg qu'il faut attribuer la disparition du Copenhague, un cinq-mâts école de la marine danoise qui quitta Buenos Aires, le 14 décembre 1928, pour l'Australie.

Le 22 décembre, il envoya un radio. Il était à 900 milles de Tristan da Cunha, puis ce fut le silence.

Il devait atteindre Melbourne au milieu du mois de mars. À cette époque, au lieu de l'arrivée du Copenhague, une inquiétante information fut publiée en première page des journaux : « Depuis cent jours, on est sans nouvelles du plus grand voilier du monde qui se rendait d'Argentine en Australie avec 75 hommes ».

L'East Asiatic Company qui avait armé le cinq-mâts envoya un navire, le Mexico, à sa recherche. Le Mexico ne disposait que d'un seul repère, la dernière position donnée par le Copenhague, à 900 milles, comme nous l'avons dit, de Tristan da Cunha. Si le voilier avait été en difficulté, son commandant avait peut-être relâché dans cette île. On interrogea donc ses habitants qui affirmèrent avoir aperçu au large un grand voilier dont le mât de misaine paraissait brisé. Il était possible que ce fût le Copenhague. On ne comprenait pas toutefois qu'il n'ait pas cherché un abri dans une baie de l'Île pour effectuer ses réparations.

Ce fut le seul indice qu'on recueillit sur le cinq-mâts et on pensait qu'on n'en aurait jamais d'autre lorsqu'en décembre 1938, un chalutier ramena dans ses filets une bouteille qui contenait un message. Celui-ci était à peu près illisible, mais on réussit à déchiffrer une position: 47° 37' Sud et 02° 14' Est, et surtout un nom, Kobenhavn (Copenhague), puis encore le mot iceberg.

La position donnée était vraisemblable et vraisemblable aussi l'abordage avec un iceberg. Par la suite, sur la côte australienne, on découvrit une épave qui fut identifiée comme un morceau de la coque du voilier.

Le silence du «Prince Asiatique»

La présence à bord d'un émetteur radio ne suffit donc pas parfois à dissiper le mystère de certains naufrages. On l'avait constaté déjà pour le Prince Asiatique.

Ce cargo mixte de la compagnie anglaise Rio Cap Line avait quitté Los Angeles, le 16 mars 1928, pour Yokohama. Il n'arriva jamais au Japon. On fit une enquête. On interrogea les navires qui faisaient route dans les mêmes parages à cette époque. Deux d'entre eux avaient capté des SOS très faibles qui ne durèrent que quelques instants. Ils provenaient du pétrolier britannique British Hussar. Des postes côtiers avaient eux aussi reçu ces appels dont on pu localiser l'émission à 400 milles au sud-ouest d'Hawaï. Deux destroyers américains effectuèrent de vaines recherches. On prévint la compagnie du British Hussar. Cette dernière manifesta son étonnement : le pétrolier qu'on recherchait ne pouvait avoir coulé dans le Pacifique car il était à Abadan, dans le golfe Persique.

Donc, entre les 20 et 30 mars 1928, une portion du Pacifique délimitée par les 20e et 35e parallèles Nord et les méridiens 170 et 150 Est, avait été le théâtre de deux mystères. On avait reçu les appels de secours d'un navire qui se trouvait en sécurité à 10 000 km de là et, d'autre part, un cargo neuf, moderne et bien équipé disparaissait dans un silence total, sans trace et sans épave. Il y avait peut-être un lien entre ces deux mystères, mais lequel? Les enquêteurs finirent par le découvrir. L'indicatif du British Hussar était GJVR et celui du Prince Asiatique GJVP. Une seule lettre différenciait les deux indicatifs: un P et un R, c'est-à-dire respectivement, en morse, point deux traits point et point trait point. La confusion pouvait s'expliquer. C'était le Prince Asiatique qui avait lancé les SOS.

Mais pourquoi? Il avait affronté une tempête assez violente, en effet, mais on ne comprenait pas comment un navire neuf de 10 000 tonnes avait pu couler en quelques instants. On pouvait admettre une voie d'eau soudaine, la rupture d'un arbre d'hélice, une panne de machine, mais ces avaries n'auraient pu justifier la brièveté des appels, puis ce silence. On a vu des opérateurs continuer d'émettre alors que le navire était à moitié englouti. Comment celui du Prince Asiatique aurait il pu cesser son service dès le début du naufrage et pour quelle raison avait-il été troublé au point d'émettre incorrectement son propre indicatif?

Un enquêteur fit remarquer que vingt-six Chinois avaient été embarqués comme passagers. Il s'agissait peut-être de pirates qui avaient pris place à bord en vue de s'emparer du navire.

En principe, cette hypothèse n'avait rien d'invraisemblable. Au large des côtes de Chine, des bâtiments furent capturés de cette façon. En 1927, le Sunning, en 1929, le Haiching, en 1932, l'Ankling et le Prominent. Chaque fois, le premier acte des pirates avait été de s'emparer du poste de radio. L'opérateur avait à peine eu le temps de lancer des messages tronqués auxquels succéda le silence. Comme pour le Prince Asiatique.

On objecta que les Chinois n'auraient pas choisi une violente tempête pour attaquer. Mais cette tempête n'était sans doute qu'une coïncidence. Elle s'était déchaînée au moment même où par suite d'une circonstance fortuite, les Chinois avaient été démasqués et avait dû, malgré eux, engager la lutte avant la date fixée.

Quelque onze ans plus tard, le paquebot américain Tulsa captait, le 22 février 1939, un SOS d'un navire qui donnait comme indicatif les lettres PECC. Il était victime d'une avarie? Il était malmené par la tempête? Non, il venait d'être torpillé par un sous-marin.

Le paquebot Empress of Australia et le cargo grec Mont Pelion se dirigèrent vers le bâtiment attaqué qui continuait à lancer des SOS. Leurs commandants n'avaient pas hésité à se dérouter. Ils trouvaient pourtant étrange cette attaque par un sous-marin en temps de paix. Ils arrivèrent sur les lieux, à 550 kilomètres au sud des Açores, et ils ne découvrirent rien, ni navire, ni épave.

On chercha à identifier ce navire. La Lloyd n'avait enregistré aucune unité dont l'indicatif était PECC. Toutefois, dans les archives, on finit par trouver un PECC : un paquebot hollandais, le Flandria, qui, par une coïncidence curieuse, n'avait plus donné de ses nouvelles et avait été considéré comme perdu.

Des pêcheurs affirmèrent avoir vu, dans les parages où s'était produite la prétendue attaque, des formes mystérieuses qui auraient très bien pu être celles de sous-marins.

Les autorités ne tinrent pas compte de ce témoignage, probablement dû à une hallucination collective. En revanche, elles examinèrent le rapport du commandant d'un pétrolier qui, à 300 kilomètres du point d'émission des SOS, avait signalé une mine flottante, dérivant sans doute à partir des côtes d'Espagne où elle aurait pu être mouillée pendant la guerre civile. Le navire inconnu aurait été victime de cette mine.

Ce n'est pas un fait de guerre qui fut à l'origine de la disparition du cuirassé brésilien Sao Paulo. Il fut mis, hors de service en 1945, mais il resta mouillé en rade de Rio de Janeiro jusqu'en 1950, date à laquelle il fut acheté par une société anglaise de récupération de métaux. Un an plus tard, deux puissants remorqueurs conduisaient le Sao Paulo vers un port anglais où il devait être démoli. À bord du cuirassé, huit marins se relayaient à la barre et à la surveillance des aussières.

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