Le Vaisseau Fantôme
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Ces vaisseaux qu'on appelle fantômes

 

 
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4/4

Ces vaisseaux qu'on appelle fantômes
Robert De La Croix
p.103 à 112

(suite 4)

On a perdu un cuirassé
Le 3 novembre 1951, une dépression fut annoncée sur l'Atlantique. Dans la nuit, des rafales commencèrent à creuser la mer. La tempête devint si forte qu'un des remorqueurs dut relâcher aux Açores pour réparer son gouvernail endommagé. Le jour suivant, une des aussières qui reliaient le Sao Paulo au Bustler, le second remorqueur, donna des signes de fatigue et se rompit.

À la tombée de la nuit, on allongea la seconde aussière pour éviter qu'elle ne souffrit trop des embardées du cuirassé. Le baromètre descendait toujours. À 20h30, un grain noya toute visibilité. Le matelot qui veillait sur l'aussière poussa un cri; elle pendait, lâche, dans la mer. Elle venait de se briser et le Sao Paulo partait à la dérive.

Le Bustler fit aussitôt demi-tour, mais avec précaution pour ne pas risquer un abordage avec le cuirassé dont les feux de position n'étaient pas visibles derrière le rideau de pluie. À 23h se produisit une éclaircie et, de la passerelle au Bustler, on scruta la mer. Ce n'était qu'ombres, déchirures furtives du ciel, scintillements d'étoiles humides, vagues hautes et noires. Aucune silhouette de navire n'apparaissait, ni aucun feu.

À 2h du matin, on distingua une vague lueur au Sud-ouest, à trois milles. Ce n'était qu'un cargo qui tenait le cap en attendant une amélioration du temps. Le capitaine du remorqueur attendait l'aube avec anxiété. Comme la tempête s'était un peu apaisée, il pourrait de nouveau frapper une remorque sur le Sao Paulo. Mais quand le jour se leva, l'océan apparut tragiquement désert, dans un rayon de cinq milles.

Gibraltar, alerté, promit Ie concours d'une escadrille de la RAF. En attendant celle-ci, le Bustler poursuivit ses recherches. Le 4 novembre à 15 h, il capta un message d'espoir. Un cargo avait aperçu, à l'aube du même jour, des signaux lumineux à 25 milles de la position actuelle du Bustler.

Au moment où le remorqueur atteignait l'aire dans laquelle avaient été aperçus les signaux, les avions rasaient les vagues. Les pilotes essayaient de repérer une silhouette, un objet, une ombre même. Ils tinrent l'air jusqu'au soir sans avoir rien trouvé. Ils rejoignirent les Açores. De son côté, le remorqueur continuait ses patientes recherches. En vain.

Le lendemain, à quatre reprises, les avions signalèrent des navires sans pouvoir les identifier, car le plafond était bas et la visibilité mauvaise. Le Bustler se dérouta alors, arriva au lieu indiqué et il ne trouva pas le Sao Paulo. Ces navires devaient être des cargos ou des paquebots. Au soir, il y eut encore deux messages d'aviateurs indiquant des formes noires, à deux endroits différents distants d'une vingtaine de milles.

Un second remorqueur vint à l'aide du Bustler. C'était le Turmoil commandé par un des as de la flotte de sauvetage anglaise, le capitaine Parker. Les deux bâtiments commencèrent des recherches à partir de deux points opposés, longeant la plus grande limite de la dérive du Sao Paulo, puis rapprochant peu à peu leurs routes.

Un jour s'écoula. Tantôt on apercevait une masse sombre couchée sur les lames et ce n'était qu'un nuage. Tantôt un navire prétendait avoir reçu un message du Sao Paulo, ce qui était absurde car le poste du cuirassé désarmé avait été démonté.

Parker serrait les dents. Il aurait fallu une escadre entière et des centaines d'avions pour découvrir ce cuirassé fantôme, le premier de l'histoire de la navigation. Il dut renoncer. Sa compagnie le rappelait. Une violente tempête était annoncée. On aurait besoin de ses services.

En effet, un mois plus tard, le Turmoil allait s'illustrer dans sa tentative de sauvetage du Flying Enterprise. Quand au Sao Paulo, personne ne sut ce qu'il était devenu.

DE LA CROIX, Robert, «Ces vaisseaux qu'on appelle fantômes», Miroir de l'Histoire, p.103 à 112

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