Du bureau mobile d’Alain Pineau — Écrit depuis le tarmac à Winnipeg
WINNIPEG — Les divinités météorologiques me boudent : le verglas à Toronto et à Ottawa retardent les vols et j’ai un bon trois heures à attendre à l’aéroport de Winnipeg. Dieu sait à quelle heure je serai à la maison! Aussi bien profiter de ce contretemps pour rédiger mon rapport sur ma visite dans la capitale manitobaine. Nicole Matiation, membre de notre c.a., et Thom Sparling, directeur général de l’Arts and Cultural Industries Association of Manitoba (ACI), m’avaient aligné un horaire bien rempli. Cela a commencé jeudi matin par une réunion au Centre culturel franco-manitobain de Saint-Boniface où s’étaient réunis une dizaine de représentants d’organismes artistiques. Ici encore, la CCA est inconnue : j’ose espérer qu’elle l’était moins à la fin de notre session. Je note un intérêt pour ce que nous faisons et proposons, mais même thème qu’auprès des franco-colombiens quant à la capacité de payer. Il y a seulement tant d’organismes auxquels nous pouvons souscrire, me dit-on : comment prioriser compte tenu de nos budgets modestes? Et comment se fait-il que nous n’entendions jamais parler de vous par l’entremise de nos organismes parapluie dont vous nous dites qu’ils sont membres? Bonne question à laquelle il faudra trouver réponse s’il est jugé que la CCA a un rôle unique à jouer dans l’écologie du secteur culturel canadien.
C’est d’ailleurs le même constat qui ressort de la réunion d’après-midi au Folk Exchange, dans le quartier historique de Winnipeg, où plus d’une trentaine de représentants d’organismes anglophones s’étaient rassemblés pour entendre parler de la Conférence et de ce qu’elle propose pour assurer un avenir dynamique aux arts et à la culture dans ce vaste pays. Comment se fait-il que l’information que vous générez ne nous parvient pas? Le travail de la CCA dans le dossier du droit d’auteur et des statistiques, de même que ses préoccupations quant aux investissements publics en art et patrimoine ou quant à la propriété étrangère de nos industries culturelles suscitent pourtant un vif intérêt ici. J’accueille volontiers les recommandations qui me sont faites quant à la nécessité de moduler le style de nos communications si nous voulons rejoindre un plus grand public et élargir nos appuis : ce n’est vraiment pas tout le monde qui est un expert en développement de politiques culturelles et nos bulletins, pour informatifs et riches qu’ils soient, sont souvent trop arides et techniques. Message reçu!
Certains participants ont osé soulever des questions délicates : en ces temps difficiles, ne devrions-nous pas réaligner nos stratégies? Se pourrait-il que nous dispersions trop nos efforts et que nous ayons trop d’organismes de service qui fonctionnent en silos et ne coordonnent pas leurs activités de représentations ou leurs conférences? Une participante déclare : « Je fais partie de trois associations différentes et l’an dernier, les trois m’ont conviée à quelques semaines d’intervalle à participer à une journée sur la colline à Ottawa. Je n’ai ni le temps ni l’argent pour toutes ces activités, si importantes soient-elles! Comment choisir celle-ci plutôt que celle-là? » Cette exclamation trouve écho auprès d’autres participants, ce qui me place dans une situation un peu embarrassante : la dernière chose dont la CCA a besoin, c’est d’avoir l’air de miner d’autres organismes qui rendent des services importants à tel ou tel secteur en particulier. Mais il faut bien avouer que la question n’est pas déplacée et que je l’ai déjà entendu soulevée au cours de conversations particulières. Mais c’est un sujet tabou rarement évoqué en public. Dans un autre ordre d’idées, je ne peux m’empêcher de rapporter les propos d’un participant d’origine britannique, qui a longtemps œuvré dans les dossiers culturels pour la ville de Londres, et qui déclare emphatiquement que la Grande-Bretagne pourrait s’accommoder fort bien d’un forum national comme celui que la CCA offre. Je suis encore plus heureux de rapporter que quelques heures plus tard, j’ai reçu de lui un courriel m’annonçant que lui et son épouse avaient décidé d’appuyer la CCA en devenant membres : espérons que plusieurs autres feront de même sous peu!
Entre les deux séances de consultation publique, entrevue long format pour l’émission radio du samedi matin à CKSB, la station francophone de Radio-Canada. Quel plaisir d’avoir une vingtaine de minutes au lieu de l’habituel clip de trente secondes au cours duquel on vous demande d’expliquer des sujets aussi importants que compliqués! Ensuite, lunch dans les locaux de ACI Manitoba avec des leaders de la communauté culturelle manitobaine qui travaillent d’arrache-pied depuis des mois à la création d’une alliance multidisciplinaire dont le mandat et le membership éventuel sont au provincial l’équivalent de la CCA. Comme directeur général de la Conférence, il s’agit là d’une initiative cruciale que j’applaudis vivement : j’y vois non seulement une solidarité qui servira mieux les intérêts des communautés culturelles manitobaines mais la création du genre d’affiliés provinciaux dont nous parlons dans nos propositions pour rendre la CCA plus pertinentes au niveau national. Je me fais un plaisir d’affirmer tout mon appui à ce mouvement de convergence particulièrement essentiel par les temps qui courent.
Enfin, ce matin, réunion des plus positives avec Mme Veronica Dick, sous-ministre adjointe du Ministère de la culture, du patrimoine et du tourisme, des membres de son équipe et des représentants des conseils des arts provincial et municipal. Excellente occasion de faire le tour des dossiers d’intérêt commun, notamment au chapitre des statistiques culturelles et du droit d’auteur pour lequel la CCA reçoit des félicitations chaleureuses.
C’est ainsi que se termine une semaine bien remplie en Saskatchewan et au Manitoba. Dès lundi 30 janvier, je reprends la route pour Calgary puis Edmonton. Je ne peux qu’espérer que la météo sera de mon côté!
En réaction au billet d’Alain Pineau, suite aux rencontres à Winnipeg :
D’un autre côté, la CCA est l’un des seuls organismes canadiens capables de nous informer de façon pointue et intelligente au sujet de dossiers complexes qui touchent notre secteur (droit d’auteur, par exemple). Il serait triste de niveler par le bas sous prétexte d’être moins aride. C’est le rôle des organismes provinciaux ou sectoriaux de vulgariser au besoin pour leurs membres, selon les dossiers qui leur sont pertinents. À mon avis, il ne faut surtout pas perdre cette capacité d’analyse et de recherche de qualité pour laquelle la CCA est reconnue !