Asbestos, une histoire minière et syndicale depuis plus de cent ans
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Vie ouvrière,
syndicalisation et grève
Conclusion
Filons d'histoire
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Vie ouvrière, syndicalisation et grève – Page 3

La plus grande mine d'amiante au monde en 1940
La plus grande mine d'amiante au monde
en 1940
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Si l'aide ne venait pas de la CTCC, l'Union songeait tout de même à recourir au service d'une personne ressource225. Toutefois, cette intention n'eut pas de suite et la démobilisation se poursuivit. Le peu de succès du syndicat auprès des travailleurs amena même certains membres à suggérer que le syndicat abandonnât la cotisation d'entrée226. À la fin de 1933, il ne restait que 29 membres de l'Union.

Bien que certains membres souhaitent voir le syndicat réfléchir sur les façons de réactiver le mouvement, l'Union demeure léthargique. Ainsi, en 1935, vu le peu de membres, tous les officiers furent reconduits sur une simple proposition. Ce syndicat n'était véritablement plus représentatif des intérêts des travailleurs et sa fin approchait227. Pour les dirigeants de la CTCC, un réalignement s'imposait228.

En avril 1935, un syndicat catholique fut fondé à Thetford Mines. Supporté par la CTCC, ce syndicat souhaite négocier un contrat collectif avec l'ensemble des compagnies de l'industrie de l'amiante. Lors de l'assemblée de septembre, le Syndicat Catholique National d'Amiante de Thetford Mines présente son projet aux ouvriers d'Asbestos. Près de 500 ouvriers étaient présents afin d'écouter les représentants syndicaux expliquer leur démarche en vue d'obtenir un véritable contrat de travail.

La volonté d'affirmation des ouvriers, depuis trop longtemps mal servie par son syndicat, éclata au grand jour lorsque les ouvriers forcèrent la démission du maire de la ville qu'ils soupçonnaient de sympathie patronale. Pour le maire, ce sont véritablement les « fauteurs de troubles » de Thetford Mines qui sont à l'origine de sa démission forcée.

Bien que le maire croie au complot en provenance de Thetford Mines, l'appui des ouvriers d'Asbestos est sans équivoque et les moyens employés, sont coercitifs.

Évidemment, la compagnie minière voit d'un mauvais oeil ce mouvement d'affirmation ouvrière qui pourrait déboucher sur la création d'un syndicat beaucoup plus revendicateur. Ainsi, au mois de décembre, la Johns-Manville tente le grand coup et congédie un membre du comité de mine qui participe aux négociations avec le syndicat de Thetford Mines et la CTCC. Forts de l'appui de différentes instances de la CTCC, les ouvriers réclament que la compagnie réintègre leur camarade congédié et menacent de porter plainte au Ministère du Travail. Déjà, un projet de Fédération pour toute l'industrie de l'amiante fait surfaces229.

Cette nouvelle dynamique va forcer au réalignement du mouvement syndical à Asbestos. La restructuration est prise en main par Louis-Philippe Camirand, aumônier du Syndicat Catholique du diocèse de Sherbrooke. Le Comité du bureau de direction mis sur pied par Camirand, mandate l'aumônier, l'abbé Aubert, afin de rencontrer les officiers de la « vieille union.230 » L'abbé Camirand propose de son côté un grand ménage afin de remettre le mouvement syndical sur la bonne voie.

Face à la force du nouveau mouvement et étant donné qu'ils ne sont plus représentatifs, les dirigeants de l'Union Nationale des mineurs d'Amiante d'Asbestos doivent se rendre à l'évidence et cesser leurs activités231.

La période 1936-1937 représente une phase de structuration et réimplantation du syndicalisme à Asbestos. Si le support avait fait défaut dans le premier syndicat, il est maintenant omniprésent et la CTCC encadre l'organisation. Ce sont les aumôniers diocésains qui ont le contrôle effectif du syndicat puisque la plupart des ouvriers doivent être éduqués à toute cette culture syndicale. Au début de 1936, les remises à l'ordre sont fréquentes.

De plus, la nouvelle organisation introduit des règles de contrôle pour le moins coercitives visant à faire réfléchir les ouvriers les plus téméraires.

Philippe Roy
Philippe Roy, maire d'Asbestos
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Face à un mouvement ouvrier plus militant et revendicateur, les appuis politiques de la compagnie minière semblent s'effriter. En fait, dans les négociations avec la compagnie, Philippe Roy, maire, et Albert Goudreau, député provincial, sont délégués afin de représenter le SNCAA232. Le conseil municipal, le maire à sa tête, se permet même de défier la compagnie.

« Mr Philippe Roy nous fit comme d'habitude un discours ou l'on sut bien tout le dévouement qu'il a à la cause syndical. Il explique que le conseil désappouve la politique de la Compagnie CJM de prendre comme empoyé des étrangers tant qu'il aura des chomeurs ici et que si la chose continue le Conseil verra a prendre les moyens pour faire cesser cet état de chose, il encouragea les membres à rester unis et promis tout son appui [...]233 »

Cette sympathie du maire envers le mouvement syndical n'est pas sans soulever quelques suspicions. Le maire est toutefois bien conscient que plusieurs l'accusent de se faire du capital politique sur le dos des ouvriers234.

Dans toutes ces négociations en vue de l'obtention d'un véritable contrat de travail, la gérance de la mine ne craint pas l'affrontement avec le syndicat. Étienne Demers, secrétaire du SNCAA, fait rapport à l'abbé Camirand :

« Mauvaise nouvelle! Monsieur C. Shoemaker fait des siennes, il ne peut digérer de fermer ses portes à minuit; Le voilà qui renvoie les vieux ouvriers mariés, père de famille, pour les remplacer par des garçons la plupart de l'étranger à des salaires de 25 ¢ l'heure lorsque celui qu'on renvoie en gagne 29 ¢ l'heure. Présentement une dizaine de ces ouvriers ont été congédiés et on assure qu'une liste d'une trentaine de nom est préparée. Vous voyez, il est tought! Le Syndicat de l'Amiante est bien décidé à ne pas le laisser faire surtout parce que tout ces gens sont de nos membres [...] Et si nous n'avons pas de résultat satisfaisant, il faudra, je le crains, prendre de grands moyens.235 »

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225 APSA, op. cit., 3 avril 1927.
226 APSA, op. cit., 7 juin 1931.
227 APSA, op. cit., 6 novembre 1935.
228 Jacques Rouillard, op. cit., p. 174.
229 « Renvoi par la CJM d'un membre du comité de mine », La Tribune, Sherbrooke, Mardi 10 décembre 1935, p. 3.
230 ASNAA, Procès-verbal, 14 janvier 1936; ASNA, Procès-verbal du Conseil exécutif, 17 janvier 1936.
231 APSA, Avis de convocation, 23 mars 1936.
232 ASNAA, Procès-verbal, 15 mars 1936.
233 ASNAA, Procès-verbal, 20 avril 1936.
234 ASNAA, Procès
235 « Lettre d'Étienne Demers à l'abbé Camirand », 2 novembre 1936, Archives du Conseil central de la CTCC.


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