Du bureau d’Alain Pineau: Investir dans le domaine des arts et de la culture : une distinction entre le besoin et la demande?
CCA Bulletin 22/07
Ottawa, 6 juin 2007
Assurer la croissance et la stabilité des fonds investis dans le domaine des arts et de la culture a été l’un des objectifs principaux de la Conférence canadienne des arts (CCA) depuis des dizaines années.
Alors que le milieu des arts et de la culture célèbre le cinquantième anniversaire du Conseil des Arts du Canada, cette question a resurgi une fois de plus comme l’une des préoccupations premières du monde des arts. L’ajout de 50 millions au budget du Conseil et l’attribution de ces sommes aux artistes et organisations artistiques au cours des deux dernières années a fait naître plusieurs questions à propos de ce qui constituerait un niveau adéquat d’investissement public dans les arts par le gouvernement fédéral.
Le Conseil des Arts du Canada a récemment lancé une vaste consultation sur le développement de son plan stratégique pour la période 2008–2011, invitant les artistes, créateurs, les organisations artistiques et plus largement les Canadiens de tout horizon à partager leur vision de ce que devrait être cette importante institution. L’ampleur de la consultation révèle l’audace du Conseil qui fait preuve ici d’une louable ouverture d’esprit et démontre son désir d’accueillir de nouvelles idées et d’imaginer de nouvelles stratégies. Après avoir suivi un parcours couronné de succès au cours de ses cinquante années d’existence, le Conseil souhaite clairement poursuivre dans cette voix pour le futur.
La CCA apportera sa contribution à ce processus de consultation en collégialité avec les membres de son conseil d’administration et, comme toujours, en accueillant le point de vue de ses membres et supporteurs.
La question qui n’a cessé de stimuler le Conseil depuis sa création, en 1957, est le besoin d’assurer un investissement adéquat et stable pour le milieu des arts. Or, déterminer ce que représenterait un investissement adéquat est à tout le moins une science inexacte.
Il est intéressant de rappeler que la nécessité d’augmenter les fonds pour les arts était fortement soulignée dans le rapport du Comité d’étude de la politique culturelle fédérale (rapport Applebaum-Hébert – 1982) et le rapport du groupe de travail sur le financement des arts (rapport Bovey – 1986). Par ailleurs, ni l’un ni l’autre de ces célèbres textes ne tentait d’établir les besoins en financement pour les arts à l’aide d’une méthode quantitative. Malgré cela, le groupe de travail sur le financement des arts émettait la recommandation suivante :
« Comme objectif […] nous proposons un taux annuel de croissance réelle de 5 p. 100 d’ici à l’an 2000, 1,5 p. 100 de plus que le taux de croissance prévu pour l’économie canadienne durant cette période. Les arts recevraient donc, en l’an deux mille, 430 millions de dollars constants de plus par année. »
Le groupe de travail reconnaît par ailleurs qu’il s’agit là de projections établies sur la base de représentations faites par les artistes, les créateurs, les organisations artistiques et les producteurs.
Au cours des années, le manque d’empressement ou l’incapacité du Comité d’étude ou du Groupe de travail ainsi que de plusieurs autres chercheurs et organisations artistiques, d’établir une analyse quantitative des besoins versus les demandes, a placé le milieu des arts et de la culture dans une position difficile à soutenir, en l’absence d’arguments rationnels pour étayer les demandes d’augmentation des fonds adressées aux différents paliers de gouvernement.
Lors de l’appel récent lancé dans le cadre de l’Initiative de supplément au fonctionnement, le Conseil a reçu des demandes de bourses totalisant 98 millions $ pour un enveloppe de 50 millions $, somme constituée de fonds non renouvelables accordés par le gouvernement minoritaire conservateur. Plusieurs y verront la preuve que le budget du Conseil est cruellement inadéquat pour répondre aux besoins exprimés par un tel niveau de demandes de financement, d’autant plus que seules les organisations déjà soutenues au fonctionnement étaient éligibles pour présenter une demande pour ces fonds supplémentaires non récurrents. Ces faits ne prouvent-ils pas que les besoins en investissement dans le milieu des arts et de la culture sont assurément beaucoup plus considérables que cela puisque, entre 1991 et 2001, l’augmentation du nombre d’artistes a été presque trois fois plus importante que le taux de croissance de l’ensemble de la population active ? (Hill Strategies, Les artistes dans les grandes villes du Canada, mars 2006)
Le devoir de la CCA est de jouer le rôle d’interlocuteur responsable du gouvernement fédéral. Tout en reconnaissant que la croissance du milieu des arts et de la culture a dépassé les plus grandes aspirations de nos pionniers, la question reste posée quant à savoir quel est le niveau raisonnable et soutenu d’investissement requis de la part du gouvernement fédéral.
Le milieu des arts et de la culture apporte une contribution importante à la qualité de vie des Canadiens ainsi qu’à la vitalité de notre économie nationale et de notre main-d’oeuvre. Plusieurs modèles statistiques démontrent les impressionnants effets multiplicateurs de chaque dollar investi dans le monde des arts et de la culture. Le besoin d’investissements stables est manifeste dans tous les secteurs de la vie canadienne, incluant celui des arts et de la culture.
Traduire ces réalités en établissant un niveau réaliste d’investissement d’Ottawa dans les arts et la culture est une tâche à laquelle nous devons collectivement nous attaquer. Notre milieu se rend un mauvais service lorsqu’il joue le rôle d’éternel quémandeur pour lequel plus n’est jamais assez. Si nous voulons être crédibles dans notre approche auprès des politiciens, nous devons aborder cette question avec rigueur et discipline. Des précisions doivent être ajoutées aux demandes d’augmentation tout comme nous devons développer une stratégie de croissance à long terme qui permettra d’assurer que la demande de l’année suivante ne sera pas un appel à « plus, toujours plus ».
La responsabilité est le mot de l’heure au sein du gouvernement fédéral et il semble clair que ce mot d’ordre s’étend à tous ceux qui ont à voir avec le partage des deniers publics ou le développement des politiques. Si notre milieu veux réussir dans sa quête de croissance et de stabilisation des fonds dédiés aux arts, nous devons penser au-delà du prochain mois de mars ou des supplications bien senties des artistes et travailleurs culturels sous payés et sous appréciés.
L’annonce d’un large programme de consultation du Conseil des Arts du Canada sur son plan stratégique est une excellente occasion de mettre l’accent sur cette question cruciale. Sans argument compréhensible appuyé sur une analyse crédible pour soutenir les demandes de croissance et de stabilisation des fonds dédiés aux arts, le milieu des arts et de la culture continuera d’être perçu comme un implacable suppliant à la porte du Conseil du Trésor. Cette perception doit être renversée aussi rapidement que possible.
Si nous cherchons à obtenir une augmentation et une stabilisation des investissements dans les arts et la culture cela doit être fait dans un contexte où le niveau de croissance est stable et réaliste et les sources de financement diversifiées. Ce débat ne peut plus être différé.
Que puis-je faire ?Le mandat de la CCA est de favoriser un débat public éclairé sur les questions de politiques culturelles et nous entendons poursuivre ce rôle avec une attention particulière portée sur notre priorité première en ce qui a trait à nos priorités politiques. Si vous avez un point de vue ou des idées à partager sur les stratégies que devrait développer la CCA en ces matières, il nous fera plaisir de recevoir vos commentaires à l’adresse info@ccarts.ca.
Un rappel : vous avez jusqu’au 15 juin pour répondre au sondage en ligne sur le plan stratégique du Conseil des Arts du Canada pour 2008–2011! Pour faire part de vos commentaires concernant Un avenir en création : une invitation à collaborer à l’élaboration de notre plan stratégique, veuillez vous rendre à l’adresse suivante : http://www.50.conseildesarts.ca/fr/consultation/.
Changement de personnel au sein de la Conférence canadienne des artsLa Conférence canadienne des arts (CCA) a le plaisir d’annoncer l’arrivée de Guillaume Sirois dans le poste récemment redéfini de Conseiller en politiques culturelles et communications. Il remplace James Missen, qui quitte la CCA ce jeudi 7 juin, après près de quatre ans de services remarquables à la CCA.
Détenteur d’une maîtrise en histoire de l’art de l’université de Montréal, Guillaume Sirois a œuvré au sein de plusieurs centres de diffusion de l’art contemporain, notamment à titre de chargé de projets. Il a par la suite complété le programme en gestion d’organismes culturels, offert à l’École des hautes études commerciales (HEC Montréal).
Guillaume Sirois possède une feuille de route qui lui a permis de mener à bien plusieurs projets au sein de différents organismes artistiques. Son parcours l’a mené à travailler pour la Délégation générale du Québec à Paris pour laquelle il a coordonné un programme d’activités culturelles destiné à la Maison du Québec à Saint-Malo.
Avant de se joindre à la CCA, Guillaume était le coordonnateur de Diversité artistique Montréal, où il était responsable de la rédaction du premier plan d’affaires, de la recherche de financement et de la mise sur pied des premiers projets.
Je suis sûr que vous vous joindrez à moi pour souhaiter la bienvenue à Guillaume, qui peut être joint par courriel au guillaume.sirois@ccarts.ca et par téléphone au 613–238-3561 begin_of_the_skype_highlighting 613–238-3561 end_of_the_skype_highlighting poste 19. |