Les réalités de la crise économique dans l’UE. Quels sont les impacts pour le secteur culturel?
Le terme “programme d’austérité” est devenu une collocation partout en Europe. Des compressions majeures dans le secteur culturel ont lieu dans plusieurs pays européens et les européens habitués à une attitude plus détendue sont forcés d’absorber les mesures d’austérité. Quels sont les impacts?
France et Allemagne
La France et l’Allemagne sont les deux seuls pays qui ne planifient pas de réductions de financement en culture. Le budget du ministère de la Culture a étonnamment augmenté de 0,9% par rapport à 2011, pour un budget total de 7, 4 milliards d’euros. Paris a inauguré le 20 avril dernier, le Palais de Tokyo. L’ancien pavillon de l’Expo Universelle de 1937 a été reconstruit à un coût de 20 millions d’euros pour devenir le plus grand centre des arts en Europe (il est plus grand que 3 terrains de football!). La France est donc gâtée lorsque comparée au Royaume-Uni, dont le Conseil des arts a été coupé de près de 30%, ou au Pays-Bas dont le budget en culture est amputé de 25%. L’Allemagne a augmenté son budget dédié à la culture de 5,1% en 2012.
Pays-Bas
La coalition de centre-droite prévoit de réduire le budget de la culture de 25% (200 millions €) d’ici janvier 2013. Les taxes sur les billets des événements culturels augmenteront de 6 à 19%, bien que les événements sportifs, les zoos et les cirques seront exemptés de cette augmentation.
Danemark
Le Danemark verra son budget coupé de 5%.
Grande-Bretagne
Le ministère de la culture, des médias et des sports (DCMS) a vu son budget amputé de 24%, passant de 1,9 milliards de livres à 1,1 milliards en 2014–2015, dans le cadre de compressions gouvernementales à grande échelle. Approximativement 41% des économies seront faites à même les coûts d’administration du Ministère, notamment par l’abolition ou des réformes significatives aux 19 des 55 organismes quasi non-gouvernementaux (qungos) : Parmi les plus connus, la UK Film Council et la Theatres Trust (qui continuera en tant qu’organisme de bienfaisance indépendant).
Les compressions aux organismes de première ligne se limiteront à 15% pour les 4 prochaines années. Le plus gros coup a été absorbé l’année dernière par le Conseil des arts qui a été réduit de 30% l’année dernière. Ces réductions forceraient 1 organisme culturel sur 10 à fermer.
D’un autre côté, le gouvernement a donné un peu de vigueur au secteur des industries culturelles. D’ici avril 2013, des aménagements fiscaux dans les domaines de l’animation et de la télévision permettront de renverser la vapeur quant au déplacement de la production britannique et devraient attirer les productions étrangères au pays. Des allégements fiscaux pour la production de jeux vidéo pourraient permettre d’accroître la contribution de ce secteur dans l’économie britannique de 280 millions de livres au cours des 5 prochaines années.
Grèce
Les cambriolages dans les Musées national et municipal au cours de février, ainsi que le vol à main armée au musée d’Olympie le 5 Mars, ont exposé les faiblesses dans la protection des sites du patrimoine culturel à travers le pays, aggravée par le soi-disant programme d’austérité qui a sabré dans tous les budgets nationaux de service public.
Le ministre grec de la culture a décidé de réduire le financement de la sécurité des musées de 20%. Selon une nouvelle loi, le gouvernement grec envisage également des réductions de personnel de 30–50% au ministère de la Culture.
Italie
Un budget de 1,8 milliards d’euros dans le budget culturel ne suffit pas à préserver des sites comme le Colisée ou Pompéii, deux sites sur la liste de l’UNESCO de se dégrader. Le Colisée cherche sa survie chez le magnat de la chaussure Della Valle propriétaire de Tod’s un marque de chaussures – qui a promis d’investir 25 millions d’euros dans sa revitalisation. Les budgets de La Scala et du Piccolo Teatro ont été coupés de 17 millions d’euros. Bien que les Italiens peuvent prétendre à la moitié du patrimoine mondiale sur la péninsule des Apennins, le gouvernement ne dédie que 0,21% de son budget national à la culture, alors que la moyenne dans les pays européens est de 1%. Le directeur d’un musée d’art moderne près de Naples a même entrepris de brûler progressivement sa collection en signe de protestations.
Espagne
L’Espagne fait face un taux de chômage de 23% et redouble d’efforts avec ses voisins portugais pour demeurer dans la zone euro. Le secteur culturel espagnol contribue à 4% du PIB et fournit de l’emploi à 2,8% des Espagnols. Le budget de l’Institut du film qui soutient la cinématographie espagnole a été réduit de 35 pourcent, passant donc de 106 millions à 69 millions d’euros.
La deuxième coupe en importance, soit 14%, est attribuée à la Bibliothèque des arts de la scène et de la musique. Dans l’ensemble, les compressions en culture se situent à 15%.
République Tchèque
Le gouvernement de coalition de la droite songe à abolir 3 ministères dont celui de la Culture. La République Tchèque investit à peine 0,6% de son budget total dans ce domaine. En fait le gouvernement se fie plutôt aux programmes de l’Union européenne qui contribuent en grande partie à la survie des arts.
Le pays serait donc sur la liste des pays européens, dont la Hongrie, l’Autriche, la Finlande et le récent Portugal n’ayant pas de ministère de la culture. La république Tchèque concurrence avec les autres pays de l’Est pour accueillir les producteurs de l’Europe de l’Ouest. Les mesures incitatives de l’industrie du film comptent pour 800 millions de couronnes (32,3 millions d’euros).
Barbora Polachova est une étudiante de la République Tchèque qui a travaillé à la CCA dans le cadre d’un projet de stagiaire avec l’Union européenne.