QUESTIONS DE CULTURE
Ottawa, le 14 juin 2004 – Maintenant que tous les partis ont publié leur programme officiel et que la course progresse, on détecte un pressentiment indéniable parmi les Canadiens qui appuient les arts. Informée de l’absence de questions sur les arts, la culture et le patrimoine dans le débat des chefs, la CCA a décidé de poser elle-même quelques questions.
Trois jeux de questions pour les libéraux
· Pourquoi ne pas défendre fièrement le bilan raisonnable d’appui et de politiques culturelles que vous avez mis en place depuis quelques années? Comme on reconnaît largement la valeur économique et la contribution à la croissance et la cohésion des collectivités que représente l’appui des arts, pourquoi ne pas claironner ce que vous avez fait? La CCA a communiqué directement avec les dirigeants du Parti libéral et appris que celui-ci avait à tout le moins l’intention de maintenir le financement en place. Est-ce que le classement du premier ministre dans cette campagne ne s’améliorerait pas s’il énonçait clairement son appui pour les arts, le patrimoine et les industries culturelles?
· Bien que les libéraux mentionnent leur appui du traité sur la diversité culturelle qu’élabore l’UNESCO, ils n’indiquent pas s’ils maintiendraient les restrictions sur la propriété étrangère dans l’industrie de la radiodiffusion, actuellement menacées par un rapport du Comité de l’industrie. Puisque un sondage Ipsos-Reid révèle que 85 % des Canadiens sont en faveur de maintenir la propriété et le contrôle de nos industries de radiodiffusion, pourquoi les libéraux se taisent-ils au lieu de faire connaître leur appui pour cette importante mesure de politique publique?
· En réponse aux interventions bien raisonnées des grands organismes artistiques (p. ex., Shaw, Stratford, la Compagnie d’opéra canadienne), les libéraux proposent l’injection de fonds nouveaux et grandement nécessaires par l’intermédiaire du Conseil des Arts du Canada. Pourquoi ne pas s’occuper aussi du problème plus fondamental de sous-financement chronique du Conseil des Arts en faisant passer le budget de 153 millions de dollars à 300 millions?
Du côté des conservateurs
Selon un porte-parole du Parti conservateur, « rien dans le programme électoral ne laisse sous-entendre un statu quo durant un premier mandat du Parti conservateur ».
· Comme le programme ne mentionne pas les arts, peut-on envisager un statu quo quand il est prévu d’examiner tous les programmes de financement du gouvernement?
· Il n’est pas question de l’intention des conservateurs d’appuyer la propriété canadienne de la radiodiffusion, mais l’on parle d’examiner la pertinence du CRTC. Dans le guide des candidats du parti, on envisage de restructurer et de réduire le CRTC. Cette démarche aurait certes des conséquences défavorables sur la production et la distribution du contenu canadien. Les conservateurs tiennent-ils à appuyer le contenu canadien?
· Un point du programme est extrêmement explicite, à savoir que le moyen de défense de la valeur artistique serait complètement éliminé du projet de loi C-12 (Loi modifiant le Code criminel pour la protection des enfants et autres personnes vulnérables et la Loi sur la preuve au Canada). Comment les conservateurs peuvent-ils penser que nous verrons la logique d’un programme qui, d’une part, favorise une plus grande liberté d’expression pour les organisations religieuses et, d’autre part, menace de supprimer les droits durement gagnés des artistes en vertu de la même Charte des droits et libertés?
Le vendredi 11 juin, la CCA a publié un bulletin reprenant d’autres déclarations des conservateurs (28/04 – La CCA apprend à connaître ses voisins, le Parti conservateur du Canada) en réponse à des questions précises.
NPD : Est-ce que les artistes sont inclus parmi ceux qui ne seront pas « abandonnés à leur sort »?
En ce qui concerne le NPD, on peut se demander pourquoi il n’y a pas plus de détail dans le programme d’un parti qui a tant appuyé les arts. Le NPD continue à manifester son appui. Il a par exemple été le seul, avec le Bloc, à participer à la manifestation de groupes d’artistes et de travailleurs qui s’est déroulée sur la colline du Parlement l’hiver dernier, sous le thème Notre Canada n’est pas à vendre, afin de défendre la propriété canadienne dans l’industrie de la radiodiffusion. Nous continuons toutefois à nous poser des questions.
· Comme il a appuyé les mesures fiscales visant à faire en sorte que les artistes et autres travailleurs gagnent un revenu respectable, pourquoi, dans son programme, le parti n’a-t-il pas fait fond sur son projet de loi d’initiative parlementaire visant à exempter les artistes de l’impôt sur une part de leur revenu provenant de leurs activités artistiques et du droit d’auteur?
· Le NPD a travaillé avec acharnement pour préserver le moyen de défense de la valeur artistique visé par le projet de loi C-12 et défendra sans doute cette position sous un nouveau gouvernement. (Comme exemple de son soutien, signalons que le NPD a organisé une séance de lecture sur la colline du Parlement durant la Semaine de la liberté de lire de février dernier.) Pourquoi ne pas mentionner dans son programme cette défense importante des droits garantis par la charte?
En Bloc
Le Bloc l’emporte sur tous les partis pour son énoncé de mesures sensées en matière de politique culturelle et son appui des arts. Toutefois, cet appui se limite aux questions culturelles qui concernent « la belle province »; il ne faut pas s’attendre à ce que le Bloc appuie des mesures qui avantagent les artistes dans les autres régions du Canada.
· Est-il si difficile de reconnaître qu’il existe aussi une culture dans les provinces autres que le Québec?
Près de 10 % des Canadiens travaillent dans le secteur des arts et des industries culturelles; cela signifie que ces personnes, leurs amis et leurs parents ont grand intérêt à connaître les réponses des chefs de partis à ces questions. Pourquoi donc la culture est-elle laissée pour compte dans les médias et le débat des chefs?