La CCA publie son analyse annuelle du budget fédéral
CCA Bulletin 24/08
17 juillet 2008
Les constats principaux
La Conférence canadienne des arts (CCA) publie aujourd’hui son analyse du budget fédéral dans lequel elle examine le financement de 2007–2008 à 2008–2009 destiné au ministère du Patrimoine canadien, aux organismes culturels et aux sociétés d’État.
Il est encore difficile, après presque trois ans, de cerner la position que le gouvernement pourrait prendre à l’égard de la culture dans l’éventualité où il pourrait avoir à resserrer les cordons de sa bourse conformément à ses priorités connues, dans le contexte d’une économie morose et de la disparition des excédents budgétaires, en particulier en raison des diminutions de la TPS.
Certaines constatations s’imposent. En premier lieu, stabilité semble le maître-mot : les niveaux globaux de financement ont été très bien maintenus dans le Budget 2008. À peu près toutes les organisations examinées dans l’analyse n’ont pas connu de variation de financement supérieure à 4 p. 100, et le secteur pourrait profiter d’autres dépenses dans le processus du budget supplémentaire.
Deuxièment, le financement des subventions et des programmes de contributions clés du ministère du Patrimoine canadien est également assez stable, à l’exception notable de Culture canadienne en ligne, dont le financement s’est évaporé complètement et de façon inattendue dans le Budget 2008.
L’analyse confirme par ailleurs que le gouvernement semble favoriser un rôle accru du secteur privé dans le domaine culturel et qu’il envisage d’installer des institutions culturelles nationales à l’extérieur de la région de la capitale nationale, comme on l’a vu dernièrement dans le processus de détermination de l’emplacement du Musée du portrait du Canada et aussi en ce qui a trait au Musée canadien des droits de la personne.
La réorientation apparente de la démarche du gouvernement à l’égard du secteur culturel suscite des préoccupations réelles, comme d’ailleurs le manque de transparence et de prévisibilité du processus décisionnel, particulièrement en ce qui a trait aux arts et à la culture. La culture n’est pas au nombre des priorités du gouvernement, et l’intérêt du ministère du Patrimoine canadien pour les grandes politiques et les engagements à long terme semble s’être atténué, comme l’illustre le fait que nous attendons encore la nouvelle politique muséale dont tous les partis politiques et les intéressés respectifs, dans un grand consensus, souhaitaient l’élaboration il y a presque quatre ans.
Enfin, il n’est pas rassurant de voir que la plus grande partie du nouveau financement destiné au ministère du Patrimoine canadien au cours des trois dernières années a profité au sport (en grande partie pour les Jeux olympiques de Vancouver 2010) et aux nouveaux programmes culturels ciblant les événements communautaires à l’échelle locale. De plus, même si le Ministère indique qu’il demandera le renouvellement de la plupart des programmes qui faisaient partie de l’enveloppe Un avenir en art, ces engagements ne sont aucunement des garanties, parce que les gouvernements peuvent changer d’idées à pied levé.
Pour en savoir davantage
De façon plus particulière, l’analyse indique qu’en commençant avec le Budget principal des dépenses, les dépenses ministérielles globales vont augmenter au cours du présent exercice par rapport au précédent (ce sont des chiffres qu’on doit interpréter avec prudence, parce qu’ils n’incluent pas les dépenses du budget supplémentaire).
Si c’est certainement une bonne nouvelle pour le ministère, elle masque cependant la distribution des changements des dépenses dans les diverses activités de programme. Comme l’indique le Rapport de Patrimoine canadien sur les plans et priorités de 2008-09, le ministère poursuit deux grands objectifs, exprimés en termes de résultats stratégiques :
- « Les Canadiens et Canadiennes réalisent des expériences culturelles variées et les partagent entre eux et avec le monde. »
Pour réaliser ce résultat, le Ministère « veille à ce que les Canadiens et Canadiennes puissent exprimer leur créativité, montrer leurs talents et partager leurs récits et leurs expériences grâce aux arts, aux institutions du patrimoine, aux industries culturelles et aux activités sportives. »
et
- « Le Canada est une société ouverte à tous, fondée sur la compréhension interculturelle et la participation des citoyens. »
Le ministère cherche à réaliser ce résultat en offrant des programmes de soutien de l’inclusion socio-économique pour les groupes désavantagés comme les autochtones qui vivent à l’extérieur des réserves et les minorités de langue officielle, mais également au moyen d’échanges et de dialogue autour de la citoyenneté partagée entre les Canadiens et les Canadiennes de toutes les origines et de tous les milieux.
L’analyse du budget démontre que l’augmentation la plus importante (46,1 millions de dollars) s’applique au deuxième résultat stratégique du ministère. Les dépenses destinées au premier résultat stratégique, qui comprend les programmes pour les arts, le patrimoine et les industries culturelles, sont diminuées de 17,8 millions de dollars en 2008–2009 par rapport à 2007–2008. Certaines sous-activités de programme voient leur financement augmenter (1,7 million de dollars et 19,5 millions de dollars de plus respectivement pour « la préservation du patrimoine du Canada » et « l’accès à la culture du Canada ») et d’autres recevront moins d’argent (diminutions de 1,5 million de dollars et de 37,5 millions de dollars respectivement pour « la création de contenu canadien et l’excellence des performances » et « la viabilité de l’expression culturelle et de la participation ».
Les changements globaux des dépenses au Ministère semblent donc favoriser le deuxième résultat stratégique par rapport au premier. La proportion du financement ministériel global du premier résultat stratégique était 57 p. 100 en 2007–2008; elle a diminué à 54,6 p. 100 en 2008–2009. Cette baisse est petite mais il sera important pour le secteur de surveiller ces chiffres sur une base continue étant donné que les dépenses ministérielles au titre des arts, du patrimoine et des industries culturelles sont entreprises par l’entremise du premier résultat stratégique.
Ce qui attise les préoccupations, c’est l’indication que l’on prévoit certaines diminutions importantes, particulièrement en ce qui a trait au premier résultat stratégique du Ministère, dont le financement est censé passer de 759,7 millions de dollars en 2008–2009 à 624,3 millions de dollars en 2009–2010 et à 454,7 millions de dollars en 2010–2011. Ces déclins sont reliés aux montants des programmes qui viennent à échéance au cours des deux prochaines années et s’ils se concrétisaient, la proportion des dépenses globales du Ministère au titre de son premier résultat stratégique diminuera à 52,6 p. 100 en 2009–2010 et à 46,6 p. 100 en 2010–2011. Il faut cependant interpréter ces chiffres avec une extrême prudence étant donné que le Parlement vote seulement le Budget principal des dépenses annuel (2008–2009) et que les prévisions de dépenses peuvent donc changer d’ici 2009–2010, y compris par l’entremise du renouvellement des programmes.
Comme nous l’indiquions dans un bulletin précédent, un nombre considérable de programmes du ministère du Patrimoine canadien, totalisant 342,3 millions de dollars, devront être soumis au cours des deux prochaines années au Conseil du trésor et au Conseil des ministres pour renouvellement. La CCA a contacté le Ministère concernant ces renouvellements pour déterminer s’il prévoit demander le renouvellement de ces programmes aux mêmes niveaux de financement, ou à des niveaux plus élevés ou moins élevés.
La réponse du ministère confirme le fait que l’engagement à renouveler quelque programme que ce soit ne doit pas être interprété comme une garantie. Même dans le cas des programmes pour lesquels Patrimoine dit vouloir chercher renouvellement, on nous dit qu’il ne serait pas approprié de commenter à ce moment-ci sur la probabilité d’un tel renouvellement, lequel est soumis à une variété de facteurs, y compris les priorités du gouvernement.
Dans le cas particulier du Programme de développement de l’industrie de l’Édition, on nous indique que ce programme est actuellement sous évaluation pour en établir la pertinence et l’efficience à livrer des résultats et services pour les Canadiens. La décision de le renouveler et à quel niveau ne pourra venir qu’à la fin de ce processus d’évaluation. Pour ce qui est du Programme national de formation dans le secteur des arts, il a de fait été renouvelé pour une période de cinq ans, de septembre 2007 à mars 2013 (pour une raison quelconque, ce fait ne s’est pas trouvé réflété dans le Rapport sur les plans et priorités du ministère).
Nous cherchons également à confirmer que les 25 millions de dollars destinés au Conseil des arts du Canada qui font partie de la suite de programmes jusqu’à récemment connus sous le nom d’ Un avenir en art seront reconduits. Nous attendons toujours la réponse du Ministère à cette demande d’information et vous tiendrons au courant.