LE SECTEUR CULTUREL DOIT AIDER LE GOUVERNEMENT À ADAPTER LES NORMES DU TRAVAIL FÉDÉRALES À LA MAIN D’OEUVRE CANADIENNE DU XXIE SIÈCLE
Bulletin 19/05
Ottawa, le 26 avril, 2005 — En décembre dernier, l’honorable Joe Fontana, ministre du
Travail et du Logement, a annoncé la nomination de Harry W. Arthurs au poste de
commissaire responsable de l’examen de la Partie III du Code canadien du travail
concernant les normes du travail fédérales. Le mandat de cette Commission est de « donner
des conseils axés sur l’avenir pour que la législation et les programmes fédéraux en matière
de normes du travail soient pertinents et adaptés aux besoins des milieux de travail
modernes qui évoluent rapidement. »
La Partie III du Code canadien du travail établit des normes minimum d’emploi pour les
employés et employeurs relevant de la compétence fédérale, y compris des dispositions sur
les heures de travail, le salaire minimum, les jours fériés, les préavis de licenciement, les
indemnités de départ, les congédiements injustes et divers types de congés. D’autres textes
de lois fédérales sur le travail ont été examinés au cours des dix dernières années, mais la
Partie III n’a pas fait l’objet d’un examen complet depuis son adoption en 1965. Au cours
des années, elle a été modifiée occasionnellement, mais son cadre global ne reflète pas la
réalité de la main d’œuvre canadienne du XXIe siècle.
Pour « offrir aux Canadiennes et Canadiens l’occasion de réfléchir à des solutions
législatives et non législatives visant à améliorer les lois et politiques fédérales actuelles en
matière de normes du travail », la Commission a publié un document de consultation. Ce
document, affiché sur le site www.fls-ntf.gc.ca/fr/consrpt-doccons.asp, présente les sujets
qui seront examinés :
- Placement de la barre pour les normes du travail fédérales
- Examen des normes du travail fédérales : Qu’est-ce qui fonctionne ? Qu’est ce qui ne
fonctionne pas ?
- Nouvelles formes de relations d’emploi et travail non conventionnel
- Conciliation des responsabilités professionnelles et personnelles
- Productivité en milieu de travail
- Diversité et évolution démographique en milieu de travail
- Modernisation et précision des dispositions administratives des dispositions
d’exécution du Code
La Commission sollicite des observations sur les questions et les enjeux abordés dans ce
document et tout autre sujet qui relève de son mandat. On peut trouver les lignes
directrices et instructions concernant les mémoires à :
www.fls-ntf.gc.ca/fr/submission.asp. Bien qu’il n’y ait pas de date limite pour les
mémoires, les Canadiens sont encouragés à acheminer leurs communications le plus
rapidement possible car elles pourraient servir de base à certaines des consultations
publiques à venir.
L’appel de mémoires indique que la Partie III de la Loi sur les normes du travail concerne «
les objectifs de politique sociale. » Ces objectifs sont très importants pour la Conférence
canadienne des arts (CCA) et ses membres, en particulier en ce qui concerne le « statut de
l’artiste » qui est déjà défini comme un objectif en matière de politique sociale à l’égard de
laquelle le gouvernement fédéral est engagé. Selon le ministre Fontana, cette Commission «
cherche à trouver un juste équilibre entre les mesures de protection des travailleurs
canadiens et celles visant à garantir la souplesse et la productivité au travail » et s’attend à ce
que le rapport final de l’examen et les recommandations soient prêts d’ici janvier 2006.
Comme les membres de la Conférence canadienne des arts (CCA) le savent, la main d’oeuvre
culturelle du Canada compte un certain nombre de caractéristiques importantes qui la
différencie de la main d’oeuvre canadienne en général:
- Elle est nombreuse et augmente plus rapidement, bien que le travail indépendant soit en
expansion dans tout le pays dans tous les secteurs de l’économie (il représente la moitié
de tous les nouveaux emplois créés au Canada depuis 1989).
- Elle compte un pourcentage élevé de travailleurs indépendants dont les relations de
travail et les conditions de travail sont difficiles, notamment la durée variable des
contrats et des commissions, les modalités et conditions variables des contrats, les brefs
préavis des engagements et des commissions, les modèles d’engagements séquentiels par
à-coups, les projets et contrats concurrents, la nécessité d’être disponible à tout moment
pour répondre aux offres de travail, le travail saisonnier, les lieux de travail
imprévisibles, la vulnérabilité aux tendances culturelles et aux “préférences” du marché.
- Les travailleurs sont très instruits mais mal rémunérés et ont des gains fluctuants.
En mars 2001, la CCA a fait une présentation au Comité permanent des ressources humaines au
sujet du projet de réforme du programme d’assurance-emploi. La CCA a affirmé à cette
occasion que le programme n’avait pas besoin d’une réforme – mais d’une révision complète. La
CCA reste convaincue que l’assurance-emploi se fonde sur un modèle post-industriel et ne
s’applique pas véritablement aux travailleurs et au milieu de travail du XXIe siècle. Le Comité
permanent du développement des ressources humaines a inclus dans son rapport deux
recommandations qui se faisaient l’écho des arguments de la CCA :
« Recommandation 8 : Étant donné l’incidence grandissante du travail indépendant sur le marché du
travail au Canada, le Comité recommande que le gouvernement envisage la création d’un cadre pour
étendre l’application du régime d’AE, tant pour les prestations ordinaires que spéciales, aux travailleurs
indépendants. »
« Recommandation 9 : Le Comité recommande que le gouvernement envisage d’élargir l’application du
régime d’AE aux travailleurs qui cumulent travail indépendant et emploi rémunéré. Si le gouvernement
décide de ne pas le faire, un remboursement des cotisations devrait être accordé à ceux qui ont un employ assurable mais qui ne peuvent pas présenter de demande de prestations en raison de leur statut de travailleurs indépendants. »
Il ne semble pas que le gouvernement ait donné suite par des mesures concrètes dans ce
domaine de grande importance pour la main d’œuvre culturelle. Mais ce dernier février, le
Sous-comité sur les fonds de l’assurance-emploi du Comité permanent des ressources humaines,
du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes
handicapées, présidé par le député Roger Cuzner, a publié son rapport dans lequel il formule la
recommandation suivante :
« Recommandation 22 : Étant donné l’incidence grandissante du travail autonome sur le marché du
travail au Canada, le Comité recommande que le gouvernement envisage la création d’un cadre pour
étendre l’application du régime d’AE, tant pour les prestations régulières que spéciales, aux travailleurs
autonomes. »
(On peut consulter le texte complet du rapport à :
www.parl.gc.ca/infocomdoc/documents/38/1/parlbus/commbus/house/reports/humarp03/
07-toc-f.htm)
travail indépendant dans le secteur culturel est très fréquent, allant jusqu’à 67% dans
certaines disciplines. Contrairement à ce que l’on croit généralement, le travail indépendant ne
confère pas d’avantages automatiques à ceux qui choisissent cette forme de travail. Statistique
Canada indique que la majorité des artistes gagnent moins que les garçons de cuisine ou les
travailleurs des services alimentaires, les coiffeurs et les barbiers, les ouvriers agricoles en
général et les personnes qui travaillent dans les secteurs du repassage, du nettoyage à sec et de
la finition. De plus, les travailleurs indépendants n’ont pas accès aux avantages sociaux dont
bénéficient les autres membres de la population active, en particulier l’assurance-emploi.
Comme nous l’avons dit dans notre présentation au Comité des Finances en novembre dernier
pendant les consultations pré-budgétaires, « la CCA demande instamment au gouvernement du
Canada de procéder à un examen approfondi des questions et des besoins spécifiques de TOUS
les travailleurs indépendants de ce pays, dans le secteur culturel et autre. Cet examen s’est fait
attendre trop longtemps. La CCA recommande que le ministère des Finances joue un rôle de
premier plan dans une étude exhaustive consacrée au travail indépendant sur le marché du
travail d’aujourd’hui au Canada, examinant des modèles des secteurs public et privé dans
diverses situations et divers pays, mettant plus particulièrement l’accent sur les avantages pour
la société et élaborant un cadre qui permet la participation, sous une forme ou une autre, des
travailleurs indépendants au régime d’assurance-emploi. »
Depuis plusieurs années, la CCA est en première ligne dans les efforts déployés pour
sensibiliser les responsables de l’Agence du revenu du Canada (ARC) aux caractéristiques
spéciales du travail dans le secteur culturel, en particulier le travail indépendant – comme en
témoigne la dernière manifestation de cette lutte, la campagne en cours pour un « Juste
traitement fiscal des artistes » (voir les bulletins 55/04 et 02/05 de la CCA ou
www.ccarts.ca/fr/fairtax.htm). La question d’une meilleure protection des travailleurs
autonomes préoccupe beaucoup le secteur culturel dans son ensemble et devrait préoccuper les
députés et le gouvernement canadien également.