Mise à jour sur la crise du Fonds canadien de télévision
Bulletin de la CCA 14/07
Ottawa, lundi le 2 avril 2007
Les faits en résuméContrairement au long processus public qui a entouré la revue par le CRTC de sa politique sur la radio commerciale, sur la télévision traditionnelle ou sur l’impact des nouvelles technologies sur la radio-télédiffusion traditionnelle, l’examen du Fonds canadien de télévision (FCT) a quitté l’arène publique fournie par le Comité permanent des Communes sur le Patrimoine et se déroule pour l’instant à huis clos, avec la promesse d’une hypothétique audience publique en cas d’échec des négociations actuelles.
Le 20 février dernier, le CRTC annonçait la création d’un groupe interne de travail chargé « (d’) atteindre un consensus pour résoudre les problèmes soulevés par les intervenants ou, à défaut de consensus, de définir les options possibles pour trouver une solution aux questions qui n’auront pas été résolues. Le Groupe de travail rendra public son rapport final. Si requis ou recommandé (notre emphase) dans le rapport, le Conseil émettra un avis public et tiendra une audience. Les travaux du Groupe de travail nécessiteront une interaction soutenue et une très grande ouverture entre les intervenants, et peut nécessiter de partager des informations confidentielles. Les travaux du Groupe de travail se feront donc dans la confidentialité. »
Le mandat du Groupe de travail, dont le rapport est attendu en juin, est relativement limité :
Depuis plusieurs semaines, sans prendre de notes, les membres du Groupe de travail rencontrent à huis clos les diverses parties intéressées au débat, dans la recherché d’une solution qu’il pourrait présenter à une Ministre du Patrimoine sans aucun doute fort reconnaissante. Le mardi 27 mars, c’était au tour de la CCA de rencontrer le Groupe de travail. Nous avons profité de l’occasion pour rappeler les principales considérations que le CRTC devrait avoir à l’esprit dans sa recherché d’un compromise politique entre les câblodistributeurs rebelles et les autres parties prenantes au FCT.
La CCA a exprimé ses préoccupations face au processus global entourant la crise et a réaffirmé l’appui donné au FCT le 26 février dernier dans un mémoire présenté au Comité parlementaire du Patrimoine. Il est étonnant de constater que sans que ni Shaw ni Vidéotron ait jamais déposé de plainte formelle auprès du CRTC, sans autre processus public d’analyse ou d’examen du dossier autre que celui fourni par les audiences du Comité parlementaire, le communiqué de presse du CRTC se contente de faire écho aux arguments des deux câblodistributeurs, sans remettre aucunement en question la prétention que «des préoccupations soulevées depuis plusieurs années par différents intervenants, dont Shaw et Québécor, demeurent en ce qui a trait au fonctionnement et à l’administration du FCT », que ces préoccupations ne peuvent être résolues à l’intérieur des structures de gouvernance du Fonds et que le Conseil d’administration du FCT a failli dans ses responsabilités. Pour en savoir davantageLa crise du Fonds canadien de télévision soulève clairement et de façon dramatique la question fondamentale de qui prend les décisions concernant les politiques et stratégies culturelles au Canada. Comme le disait le président du FCT, M. Douglas Barrett, lors de la séance d’ouverture des audiences du Comité parlementaire du Patrimoine :
Il nous apparaît remarquable que sans que ni Shaw ni Vidéotron ait jamais porté plainte officiellement auprès de qui que ce soit, sans autre forme d’examen public que celui fourni par les audiences du Comité parlementaire, le communiqué émis par le CRTC le 20 février s’en tienne à faire écho aux accusations des câblodistributeurs en disant que « Des solutions doivent être apportées aux préoccupations sérieuses soulevées par Shaw et Quebecor et au sujet desquelles le Conseil d’administration du FCT ne s’est pas encore prononcé. » La CCA croit que la crise du FCT doit être traitée dans le cadre d’un examen holistique de l’écologie du système canadien de l’audiovisuel afin de s’assurer que ce système est propres à l’atteinte des objectifs culturels établis dans la Loi sur la radiodiffusion (1991), une perspective qui n’est sûrement pas celle reflétée dans le mandat donné au Groupe de travail.
Comme l’ont souligné plusieurs des témoins qui ont comparu devant le Comité du Patrimoine, le FCT joue un rôle crucial pour la production télévisuelle canadienne et par conséquent, pour la politique culturelle canadienne, si tant est qu’une telle chose existe. Tout dollar accordé par le FCT amènes plusieurs dollars dans la production indépendante de programmes qui nous parle de nous, qui divertissent et forment nos enfants et qui reflètent notre point de vue sur le monde dans lequel nous vivons.
Le Fonds est un des outils de politique central à la vitalité d’un secteur indépendant de production audiovisuelle canadien et comme tel, un des outils principaux pour l’atteinte des objectifs culturels établis par le Parlement dans la loi. Les citoyens canadiens bénéficient tous et toutes des programmes souvent honorés qui sont ainsi produits dans des genres qu’il est difficile de financer dans un pays comme le nôtre, sans parler des avantages économiques de ce secteur qui emploient plusieurs milliers de personnes.
En réponse aux accusations levées par les câblodistributeurs, le Comité du patrimoine a reçu plusieurs témoignages convergents quant à l’efficacité, l’efficience et l’imputabilité du FCT. L’expérience passée démontre que l’organisation dispose des mécanismes de gouvernance et d’une dynamique qui lui permettent de s’adapter aux circonstances changeantes sans qu’aucune des parties prenantes ait à recourir à ce qui s’apparente à la désobéissance civile.
Malheureusement, les accusations non prouvées de Shaw et de Québécor quant à l’inefficacité du FCT et de son manqué d’imputabilité ont encore détourné l’attention des vrais problèmes du système canadien de radiodiffusion: une structure de financement grossièrement inadéquat et un système de réglementation qui s’appuie sur de mesures incitatives dont les effets démontrés sont plus en faveur de la profitabilité des entreprises que de l’atteinte des objectifs culturels dont le CRTC est sensé être le chien de garde.
Les faits démontrent que la création voulue par le CRTC d’un mode hautement concentré de propriété des entreprises de radiodiffusion et de distribution, et sa persistance à s’en remettre à des mesures d’incitation plutôt que de réglementation, n’ont pas produit, au Canada anglais à tout le moins, la programmation canadienne de haute qualité qui nous a été promise à multiples reprises au cours des trente dernières années. L’état actuel de la réglementation et plus encore, le refus du CRTC de la faire respecter ont mené à une situation où tout le secteur de production audiovisuel se retrouve otage de conglomérats médiatiques dont la préoccupation légitime est d’augmenter les profits des actionnaires. Les câblodistributeurs (et autres formes de distributeurs) exigent encore moins de réglementation, oubliant commodément qu’ils n’existeraient pas eux-mêmes sans réglementation et diverses formes d’appuis financiers. |