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Radio-Canada : Des compressions attendues de tous

Si le bud­get fédéral con­te­nait quelques sur­prises, les coupes à Radio-Canada/CBC n’étaient pas de celles-là. Il y a plusieurs mois que l’on attendait ces com­pres­sions à la société d’état. Le min­istre James Moore avait con­tinué d’affirmer que, comme toutes les agences, la SRC devra effectuer des coupes oscil­lant entre 5 et 10%.  Il ne fal­lait pas être devin pour prédire des coupes d’environ 115 mil­lions de dol­lars. À cela il fau­dra ajouter, comme dans le cas du Min­istère et de ses agences et sociétés, l’obligation d’absorber l’augmentation des coûts d’affaire.

Les com­pres­sions

Voici dans les grandes lignes de la façon dont les com­pres­sions se traduiront :

  • Perte de 650 emplois;
  • Fin de la trans­mis­sion par satel­lite et sur ondes cour­tes du ser­vice RCI;
  • Et fin de la dif­fu­sion des bul­letins de nou­velles de RCI.

En fait le bud­get de RCI est amputé de 80% à Radio Canada Inter­na­tional et 40 employés, soit 65% de l’effectif ont reçu leur avis de départ.

  • Intro­duc­tion de la pub­lic­ité sur Espace Musique et sur Radio 2. Une demande en ce sens a déjà été déposée par la direc­tion de la SRC;
  • Loca­tion d’une grande super­fi­cie du Cen­tre cana­dien de radiod­if­fu­sion de Toronto ainsi que vente de cer­tains immeubles;
  • Et accéléra­tion de la fer­me­ture des antennes analogiques : « Con­tin­uer d’exploiter 620 émet­teurs pour join­dre 1,7 % de la pop­u­la­tion con­stituerait une mau­vaise util­i­sa­tion de nos ressources si tout allait bien; dans les cir­con­stances actuelles, cette stratégie n’est cer­taine­ment pas viable. » [1]

Il y a des coupes qui s’entendront ou se ver­ront et qui, comme celles imposées à Télé­film et à l’Office national du film, auront des réper­cus­sions sur les artistes et pro­duc­teurs indépendants.

CBC

  • Aug­men­ta­tion du nom­bre de reprises – six séries cana­di­ennes orig­i­nales de moins aux heures de grande écoute, 175 heures de pro­gram­ma­tion orig­i­nale de moins;
  •  Réduc­tion du nom­bre de pro­duc­tions musi­cales en direct à la radio (nou­vel objec­tif : entre 100 et 150 cap­ta­tions par an);
  • Élim­iner les dra­ma­tiques radio de la grille de Radio One;
  • Et réduc­tion des coûts de la pro­gram­ma­tion d’information : annu­la­tion de Con­nect à CBC News Net­work et de Dis­patches à CBC Radio.

Radio-Canada

  • Annu­la­tion des émis­sions de nuits à la Pre­mière Chaîne et réduc­tion du bud­get de pro­duc­tion musi­cale à Espace musique;
  • Opti­mi­sa­tion de la ges­tion des droits;
  • Diminu­tion du nom­bre d’épisodes pro­duits et révi­sion des devis de pro­duc­tion interne et externe pour cer­taines émis­sions et séries télévisées;
  • Diminu­tion des coûts de pro­duc­tion du RDI à Mon­tréal et dans les cen­tres régionaux;
  • Diminu­tion de moitié des créneaux de dif­fu­sion régionale sur les ondes d’Espace musique;
  • Et réduc­tion du finance­ment tem­po­raire des ser­vices Inter­net et numériques.

Les réac­tions

Des réac­tions se sont fait enten­dre des groupes habituels. Friends of Cana­dian broad­cast­ing pub­li­ait dès le 29 mars, un com­mu­niqué dans lequel il dis­ait: « Le bud­get d’aujourd’hui isole la SRC dans des coupes hos­tiles qui con­tre­dis­ent la promesse élec­torale des con­ser­va­teurs de main­tenir ou d’accroître le finance­ment du radiod­if­fuseur pub­lic national ».

La Writ­ers Guild of Canada affirme qu’une « telle réduc­tion com­pro­met­tra grande­ment la capac­ité de Radio-Canada à s’acquitter de son man­dat en vertu de la loi sur la radiod­if­fu­sion et de con­tin­uer à offrir une alter­na­tive essen­tielles aux radiod­if­fuseurs privés du Canada. »

Au Québec, le min­istre des finances Ray­mond Bac­hand s’est dit préoc­cupé par les coupes impor­tantes à Radio-Canada et à Télé­film. Québec Sol­idaire et les syn­di­cats ont égale­ment été out­rés de l’ampleur des com­pres­sions. Un « sit-in » a eu lieu le 10 avril devant la cinéro­bot­h­èque de l’ONF pour con­tester les com­pres­sions dans les trois agences liées à l’audiovisuel.

Enfin, on compte déjà des dom­mages col­latéraux. Les syn­di­cats comme La guilde des musi­ciens et l’Union des artistes éprou­vent présen­te­ment beau­coup de dif­fi­cultés à négocier avec le radiod­if­fuseur pub­lic qui a, semble-t-il des attentes à la baisse. Comme le dit Ray­mond Legault, prési­dent de l’Union des artistes au Devoir du 20 avril: «Je com­prends bien la sit­u­a­tion, mais je ne pense pas que les salaires des employés ou des dirigeants vont dimin­uer à RC, dit le chef syn­di­cal. On fonc­tionne plutôt par attri­tion de postes. Ce serait donc plus accept­able de dimin­uer les cachets des artistes? Déjà que les coupes vont avoir des effets sur les pro­duc­teurs, qui vont nous les refiler. Si les dra­ma­tiques passent de 13 à 10 épisodes, c’est d’autant, moins de tra­vail pour nos mem­bres, des tra­vailleurs autonomes au statut précaire.»

Dans un sondage Léger Mar­ket­ing pub­lié le 7 avril dernier dans Le Devoir, con­firme que 70 % des Cana­di­ens sont sat­is­faits de la réduc­tion de dépenses de 5,2 mil­liards annon­cée dans le bud­get (20 % d’insatisfaits).

Si la pop­u­la­tion cana­di­enne s’est dite inquiète des com­pres­sions dans la fonc­tion publique cana­di­enne, la réduc­tion de 10 % du bud­get de Radio-Canada et de CBC partage la pop­u­la­tion en deux groupes égaux et dans une moin­dre mesure que les emplois dans les ser­vices fédéraux. Dans le cas de Radio-Canada, ce sont les provinces du Man­i­toba, de la Saskatchewan et de l’Alberta qui sont les plus ent­hou­si­astes aux coupes à la SRC.

Et c’est là que le bât blesse pour la Société. Mon­sieur et madame « Tout­le­monde »  n’ont pas réagi aux com­pres­sions parce qu’ils ne pour­ront la percevoir de façon significative.

Le pro­fesseur Pierre Bélanger du départe­ment de com­mu­ni­ca­tions à l’Université d’Ottawa com­mente : « On a un gou­verne­ment qui a un bon dis­cours: Les ponts tombent à l’eau; la dette s’accroît, on doit établir nos pri­or­ités et faire des choix. L’objectif est de réduire la dette pour l’avenir et pro­téger les généra­tions futures. Le gou­verne­ment opte pour des com­pres­sions là où ça fait le moins mal. Là où ça fait le moins mal poli­tique­ment. »  Force est d’admettre que ce dis­cours là fonctionne.

Cer­tains inter­venants ont d’ailleurs observé que les patrons de Radio-Canada ont annoncé les com­pres­sions sans cri­ti­quer les coupes. Ils sem­blaient accepter leur sort.  Selon Niet­zsche, la seule manière de se libérer c’est d’aimer ce qui nous advient. C’est peut-être la philoso­phie de la haute direc­tion de Radio-Canada. Pourquoi mon­ter aux barricades?

Au sujet des mises à pied à la SRC, le min­istre du pat­ri­moine cana­dien a con­fié à l’animateur de la CBC, George Stroum­boulopo­los que plusieurs des postes auraient été élim­inés par la direc­tion avec ou sans le bud­get fédéral.

“Plus de la moitié des employés qui seront élim­inés à la SRC au cours des prochaines années, plus de la moitié auraient été coupés même si nous n’avions pas touché au bud­get de la Société. Ces plans avaient déjà été élaborés de façon interne à la SRC sans égard au bud­get fédéral. » [2]

Pierre Bélanger com­mente encore une fois : « On ne peut pas se réjouir des com­pres­sions à la Société Radio-Canada. Mais je vous dirais que, con­traire­ment aux années passées, il y a des chances de se réin­ven­ter. Lors des dernières com­pres­sions, le numérique n’était qu’à ses bal­bu­tiements. Il a main­tenant pris son envol et Radio-Canada en a un bien meilleur con­trôle.  Si on pense à Hamil­ton dont la cou­ver­ture est main­tenant faite par le Web, ou Tout.TV qui est très pop­u­laire, ce sont déjà des avancées significatives. »

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