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Charles Huot et la peinture d'histoire au
Palais législatif de Québec (1883-1930)
par Robert Derome
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III Revue de la critique
Tout au long
de sa carrière, Charles Huot eut l'opportunité de s'associer
journalistes et gens de lettres. Relever les critiques et jugements qui
ont été portés sur son projet décoratif du
Palais législatif est donc intéressant à un double
point de vue. Cela nous aide d'abord à mieux comprendre l'oeuvre
du peintre en nous situant d'emblée dans le contexte idéologique
(culturel et social) de l'époque, avec son langage propre moulé
sur ses arguments ou parti pris esthétiques et artistiques. Ensuite,
cette revue de la critique nous permet de voir l'évolution de celle-ci
jusqu'à nos jours et d'évaluer la pérennité
de l'oeuvre. Les travaux entrepris par Huot ne manquèrent pas d'attirer les journalistes, d'abord par le lieu même où ils se
déroulaient, ensuite par leur ampleur qui nécessitait de
spectaculaires échafaudages. En second lieu, tous les hommes politiques
étaient appelés à voir ces travaux et en répandre
rapidement la nouvelle dans les milieux les mieux informés, les
plus huppés de la société.
Comme nous l'avons vu déjà, à elle seule
l'esquisse du Débat sur les langues avait suscité
les commentaires élogieux de L'Action sociale catholique. Pour
sa part, La Presse publie en première page une photographie
montrant l'artiste à l'oeuvre. La conclusion de l'article oriente
d'emblée toute approche critique dans un sens favorable, de par
son seul argument d'autorité:
« L'hon. M. Taschereau, ministre des Travaux Publics,
est allé voir, hier, le tableau de M. Huot. Il a fort complimenté l'artiste pour le soin qu' il prend à accomplir ce
travail. À ces compliments, nous joignons modestement les nôtres.
»
(100)
À peine l'oeuvre terminée, un ancien souscripteur
de Huot, livre une brillante critique qui résume la pensée
de ses contemporains:
« Comment, cependant, n'être pas frappé
des qualités générales de cette grande composition
historique! [...] L'effet d'ensemble, nous le répétons,
est saisissant. C'est une oeuvre réfléchie et qui
parle. Tout en observant certaine couleur locale, commandée par
son sujet, l'artiste, fidèle aux traditions idéalistes,
a écrit une page émouvante, d'une forte personnalité
et pleine de style. Il y a de la mesure et du rythme dans ce morceau éloquent.
De longues études, un labeur persévérant
et long, valaient bien à l'artiste ce succès, précédé
déjà de bien d' autres, mais où son talent ne s'était
jamais aussi hautement affirmé que dans ce dernier essai. Il peut
en être fier et attendre avec confiance les suffrages.
S'il est heureux que l'art relève ainsi de
temps en temps les leçons de l'histoire, le gouvernement de la Province
mérite d'être félicité; et nous aimons à
croire encore que l'éminent dessinateur [Eugène Taché]
de la grande salle des députés, dont la mort il y a peu laissa
tant de regrets, n'aurait pas rêvé plus vivante illustration
de son patriotisme et de sa pensée. »
(100)
Hormisdas Magnan, qui fait paraître sa critique
dans
La Vérité
du 1er novembre 1913, ajoute à l'idée de Prince:
« Disons tout de suite que M. Huot a parfaitement répondu à l'attente générale et qu'il vient de livrer
à la postérité une oeuvre de grands mérites
à tous les points de vue. [ ...] La première impression
est donc favorable à l'artiste, et ce n'est pas peu dire. Car tout
plaît et tout se compose bien dans le tableau de M. Huot. [...] On y voit peint de la manière la plus heureuse tout
un jeune peuple représente par ses députés, et luttant courageusement pour conserver
ce qu' il a de plus noble, de plus beau et de plus précieux: sa
propre vie nationale. Ce sujet bien canadien ne pouvait être traité
que par un artiste canadien, et M. Huot était mieux que personne
qualifié pour le traiter judicieusement. »
(102)
L'inauguration de l'oeuvre était accompagnée
d'une brochure d'Ernest Gagnon qui permettait de prolonger l'événement
en l'officialisant pour la postérité. (103) Celle-ci contenait,
en plus d'une photographie, un dessin schématique exécuté
par Huot (voir fig. 16). (104) Tout comme Magnan et Gagnon, plusieurs critiques
jugeront l'oeuvre tant avec des critères nationalistes qu'esthétiques.
La presse anglophone, quoique plus réservée, y alla également
d'une critique fort élogieuse:
« Mr. Huot has placed upon canvas a vivid and animative
representation of the first Legislative Asselnbly of Quebec. [...] The painting is unquestionably a work of a very high order and has been
very generally commended. »
(105)
En 1914 on commente ainsi l'oeuvre:
« [ ...] l'admirable tableau de M. Charles Huot
placé naguère en l'Hôtel du Gouvernement et représentant
le « Premier Parlement Canadien » assure à [...]
son auteur l'immortalité du souvenir. » (106)
Alors que Thomas Chapais reconnaît surtout l'importance
historique de l'événement, (107) Alma Bélanger range
l'oeuvre au sommet de notre patrimoine artistique: « Toutes les
difficultés de la peinture d'histoire, l'artiste les a surmontées
dans ce
chef-d'oeuvre. » (108) Hormisdas Magnan résume ainsi sa
pensée en 1926: « Ce tableau seul [...] suffirait à
illustrer son auteur. » (109) Alors qu'en 1927 on annonce qu'il peindra sa
troisième oeuvre, Le Conseil Souverain, on parle avec
éloge du Débat sur les langues, tout en passant sous
silence Je me souviens. Encore une fois on mêle ici le nationalisme
à l'esthétique. (110) De plus, le nationalisme s'y exprime en
commun accord avec un fort sentiment de religiosité. Le débat
sur les langues provoque chez les spectateurs le même réflexe
que celui qui les amène à baisser le ton à l'église: dans ce cas c'est la présence divine qui les pousse à ce
respect, dans l'autre c'est la présence des ancêtres glorifiés.
Le plus important biographe de Huot, Hormisdas Magnan,
qui, en plus de moult articles, a publié une monographie en hommage
à l'artiste deux ans après son décès, a exprimé
des jugements qui ont fait école. (111) Ils ont été repris
par les amis de Charles Huot (112) ou ses contemporains. Alonzo Cinq-Mars
qui a vu le peintre exécuter Le débat sur les langues
en parle en ces termes:
« Il y mit tout sou talent et tout son patriotisme. [...] c'est assurément l'
oeuvre maîtresse de Charles
Huot, la mieux réussie des trois peintures monumentales que l'on
voit dans le Palais législatif. » (113)
Maurice d'Hesry, abonde dans le même sens. (114) Cette école de pensée
survit encore en 1965 sous la plume d'Émile Falardeau:
« À nos yeux, ce tableau signifie la première reconnaissance
officielle de la langue française dans les affaires gouvernementales
de notre pays. Nous vous demandons de bien en examiner la composition,
façonnée d'une manière magistrale. [...] Des
artistes de la trempe de Charles Huot méritent un meilleur sort,
parce que ces gens-là sont aujourd'hui très peu connus.
C'est grand dommage. »
(115)
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